"Nous autres"
Publié : 05 mai 2020 12:06
C'est écrit comme ça me vient, sans préparation structurelle de récit. Juste une petite nouvelle "spontanée", frappée au km.
Pas finie, à vrai dire même je la commence. Alors, je te mets en garde, tu n'y trouveras rien qui soit en rapport avec Le social ni même ton métier (ou futur métier). Mais j'ai besoin d'évacuer en ce moment et ça m'emmerde de garder pour moi. J'aime bien avoir deux ou trois lecteurs, et peut être 1 qui aille au bout. Alors ce n'est pas l'écrit du siècle hein, juste une petite histoire sans aucune forme littéraire particulière. J'espère malgré tout que ça se laisse lire. Quelques passages érotiques "légers". A vrai dire, j'ai besoin d'érotiser le récit mais de façon non gratuite.
Nous autres
I - Les serpents de feu
Je suis fatigué. Nous sommes tous fatigués.
On a marché longtemps à travers les grandes plaines pour échapper aux serpents de feu. On a du partir de notre citée forestière : Forâ. On a du tout laisser. Les serpents crachaient cette fumée opaque, des cendres incandescentes qui brûlaient les nôtres de l'intérieur, on a du les laisser mourir pour fuir la colère de Mâara. Les anciens nous avaient prévenu : "Ne jouez pas avec les serpents de feu, ne jouez pas avec leurs bébés. Cela portera malheur ! Mâara nous punira tous pour ce que vous faites !" mais on ne les a pas écoutés, moi le premier.
Le vacarme de la fournaise nous piquait les tympans, mais on les entendait quand même, ces hurlements d'effroi et de douleur qui nous perçaient le coeur de part en part. Certains d'entre-nous, oui : ceux qui pouvaient nous suivre, certains sont restés. Ils ne pouvaient pas se résoudre à laisser périr leurs plus proches. Ils se sont laissés prendre dans ces rouleaux de flammes, ces monstres immondes, les serpents de feu. J'ai perdu Yâm. J'ai perdu ma promise. Ma seule moitié. J'ai cru l'entendre, elle aussi. Je commençais à rebrousser quand Tarik, mon fidèle, m'a accroché le bras. Nos yeux se sont croisés, il percevait ma détresse et me cria "Je l'ai vu ! Elle s'est échappée par là mais on ne plus la rejoindre, le ventre des serpents de feu nous coupe le passage ! Suis-moi ! On s'échappe vers Amâk-Ham, les grands courants d'eau ! C'est par là que les nôtres s'échappent !" Je l'ai suivi alors, mais Yâm, sa voix cristalline, j'ai bien cru l'entendre. Des vapeurs de larmes sortaient de nos yeux brûlants. C'est tout ce qu'on a pu laisser de nous, auprès des nôtres perdus, abandonnés à leur sort.
Parmi les échappés, d'autres se sont noyés dans le ventre d'Amâk-Ham en tentant de le traverser. Son courant nous entraînait et il fallait ramper fort pour ne pas se perdre dans ses entrailles. Saba ne savait pas nager, elle paniquait avec son bébé. Les serpents de feu nous léchaient encore la peau, l'air avait pris la forme d'une nuit meurtrière pour nous empoisonner, on sentait la chair animale brûler vive, on sentait la folie de Mâara, dont la colère ne semblait plus connaître de limite, on croyait tous mourir avec Fôra. Son bébé, elle me le tendit alors que je tentais de ramener sa tête à la surface par l'une des lianes de ses cheveux que je n'ai pu accrocher qu'au dernier moment. Le fond tirait Saba si fort, elle puisait toutes ses forces à maintenir son petit à la surface des écailles féroces du courant. Je n'y voyais plus rien, juste son petit, ses mains qui plongeaient. J'ai lâché pour saisir son bébé, sans pouvoir réaliser pleinement mon geste, mais la douleur de n'avoir pu sauver la mère.
Nous étions peu nombreux, finalement. Une poignée de cailloux. Vraiment, vraiment très peu. Trop peu pour survivre aux jours à venir.
*
Il fallait pourtant tenir encore, marcher le plus loin possible, et vite. Après avoir longé durant plusieurs jours le ventre d'Amâk-Ham, nous n'étions pas pour autant sortis d'affaire. Nous étions vivants donc nous étions des proies. Certains grands mangeurs de chair voulaient sentir la vie couler, la viande cuite ne les satisfaisait pas. Alors, on se sentait pister. Ils nous suivaient. On tâchaient de rester groupés, si faciles à encercler. Mais il fallait s'arrêter, il fallait marquer une pause pour récupérer, reprendre un peu nos esprits.
Baham, le petit de Saba respire encore. Faiblement, mais il respire. Il lui faut du lait, il lui faut sa mère. Parmi nos femmes sauves, aucune ne peut nourrir un petit. Mîa, une femme au grand vécu semble avoir une idée. Elle nous a écarté, nous, les hommes, pour parler aux autres femmes. On respecte. Les bébés, seules les femmes savent bien s'en occuper. Elles savent aussi s'y prendre pour les sauver quand les choses tournent mal. Elles sont allées cueillir différentes herbes, des insectes, certaines branches dont elles ôtent l'écorce, puis se mettent à les mâcher. Elles recrachent directement la bouillie dans la bouche du petit. Il respire mieux, on dirait. Il reprend la couleur de la vie. Nous n'avons pas l'habitude d'exprimer notre joie aux femmes, nous les hommes. Mais on leur adresse nos dents comme marque de reconnaissance. Nous sommes très heureux d'avoir dans notre groupe, au moins un petit à protéger. Un petit à faire grandir, si Mâara veut. Si on survit, il faudra en faire d'autres, il faudra du lait. Mîa est la plus âgée de nos femmes, mais en âge encore d'être mère. J'ai bien remarqué un regard furtir à mon endroit, alors qu'elle tient le petit Baham dans ses bras. Un regard clair, pudique, beau comme le levé d'une journée nouvelle. Et autour ses traits, ses blessures, ses cheveux noirs qui tombent sur un corps entraîné à lutter. Mîa est une survivante, et elle a survécu, encore.
Son corps. Ses yeux, elles me les donnent comme les perles les plus précieuses du monde. Yâm, ma promise. Yâm, ma moitié. Yâm, ton ventre était pour moi. Tu me voulais pour faire ensemble la vie. Ton corps, là, devant moi, à la lueur d'un petit serpent de feu. J'effleure ton visage, tes mains sur mon torse, tu veux que je reste couché, là, sur le dos. Assise sur moi, tes cuisses de chaque côté. Tu saisis mon envie folle de toi pour le mettre au creux de tes entrailles. Tu t'empales et tu restes un moment comme ça. Tes cuisses se resserrent. Tu me parles, comme tu fais toujours avec moi. Les femmes normalement ne parlent pas trop aux hommes. Mais tu m'as dit que nous, c'est différent. C'est autre chose. Étonné, je t'ai demandé, quoi ? Tu ne savais pas mieux que moi. Mais tu me parlais et tu me voulais pour toi. Moi seul, pour toi seule. C'était nouveau. Tu me parles et enfin, tu remues. Tu commences à bouger doucement, à peine, que je me sens déjà inonder ton corps. Tu aimes me sentir exploser en toi. Tu aimes prendre ma force. Mais tu es douce, toujours le regard aussi doux, et d'autant plus doux encore, maintenant que tu es pleine de moi.
*
Un sursaut me réveille ! Les pleurs du petit. Hamelle, une jeune protégée de Mîa, s'en occupe volontiers. La jeunette n'est pas encore féconde mais elle prend très à cœur son rôle. Ca lui servira pour plus tard, lorsqu'elle deviendra mère elle aussi. Toutes nos femmes devront le devenir, si ce jour arrive, lorsque nous serons suffisamment saufs pour rebâtir une tribu. Mais où ? Dans quelle citée ? Nous ne connaissons rien du monde. Nous n'avons jamais vécu que dans Forâ, aujourd'hui éteinte. Tarik n'en sait pas plus que moi. Tout au mieux l'écho des anciens qui nous parlaient de Grâanit, un monde de pierres qui va plus haut que le ciel. Ils nous disaient que ce monde est vivant, qu'il respire, qu'il souffle, qu'il crache, qu'il a droit de vie et de morts sur toutes les créatures qu'il abrite et que le fouler doit être fait avec le plus grand respect. Qu'il faut veiller sur son sol à ne tuer que pour se nourrir. Du reste, c'est l'une de nos coutumes. Nous n'enlevons la vie que pour préserver la nôtre. Nous ne mangeons que rarement de la chair. Cela peut arriver, seulement pas nécessité. Mais la plupart du temps, nous cueillons ce que nous offre Mâara. Et nous utilisons les petits serpents de feu pour griller des insectes, des mulots, des oiseaux. Les plus gros animaux nous honorent pour de plus grandes célébrations. C'est Mâara qui le veut. Elle nous offre ce que nous méritons. Elle nous gronde quand nous le méritons aussi.
Tarik a préparé une Karba, une planche à donner vie aux serpents de feu. Malgré les quelques réticences, qui peuvent se comprendre, nous en avons besoin pour tenir à distance les mangeurs de chair. Il me lance un bâton bien sec : "Vas-y ! Tu sais bien y faire, c'est toi ici qui sait pour donner la vie aux serpents de feu !" un peu gêné, du aux évènements récents, je me prépare à mettre au monde ce qui vient de tous nous dévaster. Je ne suis pas le premier à le faire, mais la découverte est récente. A vrai dire, nous ne savons pas vraiment d'où ça vient. Cela fait moins d'une génération de mère à fils que nous pratiquons ce rituel. Une demi-vie d'homme. Nos anciens nous parlaient de Mâara, que c'est elle qui a voulu nous enseigner ce secret. On ne sait pas comment, ni même pourquoi ça fonctionne. On le fait, c'est tout. Tarik apporte un nid de brindilles, ça commence à fumer. Je ne perds pas la cadence, et même, j'accélère encore. Un trou brûlant dans la Karba, je prends le nid qui semble vouloir jaillir et me met à le tournoyer fort, en m'arrêtant par moment pour y souffler plus fort, les nouveaux nés crachent d'un coup, les serpents de feu, si petits, me brûlent le bout des doigts, je les place dans le petit lit de brindilles et de petits bois et lui rend le souffle, celui qui lui permet de respirer la vie... Et de brûler.
Les femmes sont heureuses, elles lancent des petits cris de victoire. Cela nous réconforte, nous les hommes, de voir nos femmes enfin nous donner raison d'y croire.
*
Pas finie, à vrai dire même je la commence. Alors, je te mets en garde, tu n'y trouveras rien qui soit en rapport avec Le social ni même ton métier (ou futur métier). Mais j'ai besoin d'évacuer en ce moment et ça m'emmerde de garder pour moi. J'aime bien avoir deux ou trois lecteurs, et peut être 1 qui aille au bout. Alors ce n'est pas l'écrit du siècle hein, juste une petite histoire sans aucune forme littéraire particulière. J'espère malgré tout que ça se laisse lire. Quelques passages érotiques "légers". A vrai dire, j'ai besoin d'érotiser le récit mais de façon non gratuite.
Nous autres
I - Les serpents de feu
Je suis fatigué. Nous sommes tous fatigués.
On a marché longtemps à travers les grandes plaines pour échapper aux serpents de feu. On a du partir de notre citée forestière : Forâ. On a du tout laisser. Les serpents crachaient cette fumée opaque, des cendres incandescentes qui brûlaient les nôtres de l'intérieur, on a du les laisser mourir pour fuir la colère de Mâara. Les anciens nous avaient prévenu : "Ne jouez pas avec les serpents de feu, ne jouez pas avec leurs bébés. Cela portera malheur ! Mâara nous punira tous pour ce que vous faites !" mais on ne les a pas écoutés, moi le premier.
Le vacarme de la fournaise nous piquait les tympans, mais on les entendait quand même, ces hurlements d'effroi et de douleur qui nous perçaient le coeur de part en part. Certains d'entre-nous, oui : ceux qui pouvaient nous suivre, certains sont restés. Ils ne pouvaient pas se résoudre à laisser périr leurs plus proches. Ils se sont laissés prendre dans ces rouleaux de flammes, ces monstres immondes, les serpents de feu. J'ai perdu Yâm. J'ai perdu ma promise. Ma seule moitié. J'ai cru l'entendre, elle aussi. Je commençais à rebrousser quand Tarik, mon fidèle, m'a accroché le bras. Nos yeux se sont croisés, il percevait ma détresse et me cria "Je l'ai vu ! Elle s'est échappée par là mais on ne plus la rejoindre, le ventre des serpents de feu nous coupe le passage ! Suis-moi ! On s'échappe vers Amâk-Ham, les grands courants d'eau ! C'est par là que les nôtres s'échappent !" Je l'ai suivi alors, mais Yâm, sa voix cristalline, j'ai bien cru l'entendre. Des vapeurs de larmes sortaient de nos yeux brûlants. C'est tout ce qu'on a pu laisser de nous, auprès des nôtres perdus, abandonnés à leur sort.
Parmi les échappés, d'autres se sont noyés dans le ventre d'Amâk-Ham en tentant de le traverser. Son courant nous entraînait et il fallait ramper fort pour ne pas se perdre dans ses entrailles. Saba ne savait pas nager, elle paniquait avec son bébé. Les serpents de feu nous léchaient encore la peau, l'air avait pris la forme d'une nuit meurtrière pour nous empoisonner, on sentait la chair animale brûler vive, on sentait la folie de Mâara, dont la colère ne semblait plus connaître de limite, on croyait tous mourir avec Fôra. Son bébé, elle me le tendit alors que je tentais de ramener sa tête à la surface par l'une des lianes de ses cheveux que je n'ai pu accrocher qu'au dernier moment. Le fond tirait Saba si fort, elle puisait toutes ses forces à maintenir son petit à la surface des écailles féroces du courant. Je n'y voyais plus rien, juste son petit, ses mains qui plongeaient. J'ai lâché pour saisir son bébé, sans pouvoir réaliser pleinement mon geste, mais la douleur de n'avoir pu sauver la mère.
Nous étions peu nombreux, finalement. Une poignée de cailloux. Vraiment, vraiment très peu. Trop peu pour survivre aux jours à venir.
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Il fallait pourtant tenir encore, marcher le plus loin possible, et vite. Après avoir longé durant plusieurs jours le ventre d'Amâk-Ham, nous n'étions pas pour autant sortis d'affaire. Nous étions vivants donc nous étions des proies. Certains grands mangeurs de chair voulaient sentir la vie couler, la viande cuite ne les satisfaisait pas. Alors, on se sentait pister. Ils nous suivaient. On tâchaient de rester groupés, si faciles à encercler. Mais il fallait s'arrêter, il fallait marquer une pause pour récupérer, reprendre un peu nos esprits.
Baham, le petit de Saba respire encore. Faiblement, mais il respire. Il lui faut du lait, il lui faut sa mère. Parmi nos femmes sauves, aucune ne peut nourrir un petit. Mîa, une femme au grand vécu semble avoir une idée. Elle nous a écarté, nous, les hommes, pour parler aux autres femmes. On respecte. Les bébés, seules les femmes savent bien s'en occuper. Elles savent aussi s'y prendre pour les sauver quand les choses tournent mal. Elles sont allées cueillir différentes herbes, des insectes, certaines branches dont elles ôtent l'écorce, puis se mettent à les mâcher. Elles recrachent directement la bouillie dans la bouche du petit. Il respire mieux, on dirait. Il reprend la couleur de la vie. Nous n'avons pas l'habitude d'exprimer notre joie aux femmes, nous les hommes. Mais on leur adresse nos dents comme marque de reconnaissance. Nous sommes très heureux d'avoir dans notre groupe, au moins un petit à protéger. Un petit à faire grandir, si Mâara veut. Si on survit, il faudra en faire d'autres, il faudra du lait. Mîa est la plus âgée de nos femmes, mais en âge encore d'être mère. J'ai bien remarqué un regard furtir à mon endroit, alors qu'elle tient le petit Baham dans ses bras. Un regard clair, pudique, beau comme le levé d'une journée nouvelle. Et autour ses traits, ses blessures, ses cheveux noirs qui tombent sur un corps entraîné à lutter. Mîa est une survivante, et elle a survécu, encore.
Son corps. Ses yeux, elles me les donnent comme les perles les plus précieuses du monde. Yâm, ma promise. Yâm, ma moitié. Yâm, ton ventre était pour moi. Tu me voulais pour faire ensemble la vie. Ton corps, là, devant moi, à la lueur d'un petit serpent de feu. J'effleure ton visage, tes mains sur mon torse, tu veux que je reste couché, là, sur le dos. Assise sur moi, tes cuisses de chaque côté. Tu saisis mon envie folle de toi pour le mettre au creux de tes entrailles. Tu t'empales et tu restes un moment comme ça. Tes cuisses se resserrent. Tu me parles, comme tu fais toujours avec moi. Les femmes normalement ne parlent pas trop aux hommes. Mais tu m'as dit que nous, c'est différent. C'est autre chose. Étonné, je t'ai demandé, quoi ? Tu ne savais pas mieux que moi. Mais tu me parlais et tu me voulais pour toi. Moi seul, pour toi seule. C'était nouveau. Tu me parles et enfin, tu remues. Tu commences à bouger doucement, à peine, que je me sens déjà inonder ton corps. Tu aimes me sentir exploser en toi. Tu aimes prendre ma force. Mais tu es douce, toujours le regard aussi doux, et d'autant plus doux encore, maintenant que tu es pleine de moi.
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Un sursaut me réveille ! Les pleurs du petit. Hamelle, une jeune protégée de Mîa, s'en occupe volontiers. La jeunette n'est pas encore féconde mais elle prend très à cœur son rôle. Ca lui servira pour plus tard, lorsqu'elle deviendra mère elle aussi. Toutes nos femmes devront le devenir, si ce jour arrive, lorsque nous serons suffisamment saufs pour rebâtir une tribu. Mais où ? Dans quelle citée ? Nous ne connaissons rien du monde. Nous n'avons jamais vécu que dans Forâ, aujourd'hui éteinte. Tarik n'en sait pas plus que moi. Tout au mieux l'écho des anciens qui nous parlaient de Grâanit, un monde de pierres qui va plus haut que le ciel. Ils nous disaient que ce monde est vivant, qu'il respire, qu'il souffle, qu'il crache, qu'il a droit de vie et de morts sur toutes les créatures qu'il abrite et que le fouler doit être fait avec le plus grand respect. Qu'il faut veiller sur son sol à ne tuer que pour se nourrir. Du reste, c'est l'une de nos coutumes. Nous n'enlevons la vie que pour préserver la nôtre. Nous ne mangeons que rarement de la chair. Cela peut arriver, seulement pas nécessité. Mais la plupart du temps, nous cueillons ce que nous offre Mâara. Et nous utilisons les petits serpents de feu pour griller des insectes, des mulots, des oiseaux. Les plus gros animaux nous honorent pour de plus grandes célébrations. C'est Mâara qui le veut. Elle nous offre ce que nous méritons. Elle nous gronde quand nous le méritons aussi.
Tarik a préparé une Karba, une planche à donner vie aux serpents de feu. Malgré les quelques réticences, qui peuvent se comprendre, nous en avons besoin pour tenir à distance les mangeurs de chair. Il me lance un bâton bien sec : "Vas-y ! Tu sais bien y faire, c'est toi ici qui sait pour donner la vie aux serpents de feu !" un peu gêné, du aux évènements récents, je me prépare à mettre au monde ce qui vient de tous nous dévaster. Je ne suis pas le premier à le faire, mais la découverte est récente. A vrai dire, nous ne savons pas vraiment d'où ça vient. Cela fait moins d'une génération de mère à fils que nous pratiquons ce rituel. Une demi-vie d'homme. Nos anciens nous parlaient de Mâara, que c'est elle qui a voulu nous enseigner ce secret. On ne sait pas comment, ni même pourquoi ça fonctionne. On le fait, c'est tout. Tarik apporte un nid de brindilles, ça commence à fumer. Je ne perds pas la cadence, et même, j'accélère encore. Un trou brûlant dans la Karba, je prends le nid qui semble vouloir jaillir et me met à le tournoyer fort, en m'arrêtant par moment pour y souffler plus fort, les nouveaux nés crachent d'un coup, les serpents de feu, si petits, me brûlent le bout des doigts, je les place dans le petit lit de brindilles et de petits bois et lui rend le souffle, celui qui lui permet de respirer la vie... Et de brûler.
Les femmes sont heureuses, elles lancent des petits cris de victoire. Cela nous réconforte, nous les hommes, de voir nos femmes enfin nous donner raison d'y croire.
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