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Entre pauvres, on se comprend...

Publié : 16 juil. 2025 23:40
par Po3m
Toi aussi, tu veux "personnaliser" ton fil de régie publicitaire sur le web ?
Moi non plus. Entre pauvres, on se comprend...

À l'ère du sans contact, où ne manque plus que le papier toilette à ton smartphone — et ça ferait du bien à certains pour leur rappeler à leurs bons souvenirs qu'ils font caca comme tout le monde — ce n'est pas facile d'écrire de l'art sur un morceau de carton en échange d'une petite pièce.
La sonnante, la trébuchante, celle qui tintait et faisait frémir les oreilles de De Funès dans L'Avare de Molière, c'est ce à quoi cela me fait penser : une drôlerie !

Allons bon : l'argent, le flouze, le pognon, le fric, le pèze, la thune, le blé, l'oseille, les ronds, la maille, les galettes, la radée, les artiches, les biftons, les pépettes, bref LES SOUS !

Ce qui rend les gens dingues — enfin, certains — capables d'imaginer des enlèvements de gens proches, voire même d'envoyer un doigt coupé... à la sicilienne ! Mais le code d'honneur en moins, parce que la racaille ne respecte rien.

Pas mieux que tous ces délinquants en col blanc, me direz-vous, et vous aurez probablement raison.
Pas mieux que ceux et celles qui, à distance, appuient sur le bouton — celui des "fins de droits" — ou quand la misère a, elle aussi, sa réglementation.
Pour garder bonne conscience. Pour prétendre être de bonne morale.

Faire économiser 2 ou 3 milliards, dit-on : combien de pertes humaines ?
Des gens fracassés ?
Bon nombre survivront, d'autres se foutront en l'air.

En fait, de combien de suicides sont responsables les conseils départementaux ?
Pas de chiffres de cause à effet ?
Ça ferait tache pour nos élus.

Je répète : NOS élus — qu'ils n'oublient pas qu'ils sont élus — et je ne mets pas tout le monde dans le même panier.
Mais la politique de la sanction, de la radiation, de l'humiliation, la répression exercée pour lutter contre les pauvres — et non contre ce qui génère et entretient la misère — c'est la politique de la honte.
Celle d'un échec collectif.
Celle d'une société qui ne sait pas se regarder en face !

Ces mêmes gens qui se réclament d'avoir droit d'exercer sereinement, dans des conditions de travail où ils doivent se sentir en sécurité (ce qui est normal en soi).

Je me demande simplement : comment font-ils pour aller rejoindre leur petite famille le soir, lorsqu’il a fallu prendre des décisions contre-productives — qui, si elles réalisent quelques économies à court terme — contribuent surtout à bousiller des vies, et génèrent de la souffrance, morale, sociale.

À l'ère du binaire, de la crypto et des IA génératrices de dégénérés qui ne jurent que par "le temps immédiat", celui du gain, toi aussi, tu es incité·e à parier, à jouer ta vie.
Et si tu n'en as pas les moyens, tu te feras simplement rouler dessus.

Enfin, tout ça pour en revenir à l'ère du sans contact.
À l'ère du zéro et du un.
À l'ère des robots — étymologiquement : esclaves.

La France doit s'aligner sur des pays sans valeur, où productivité rime avec destruction environnementale.
Le problème n'est pas le travail en soi.
Le problème, c'est "quel travail", pour ce que tu en as, pour ce que tu en tires, pour ce qu'il reste.

Les misérables, ce ne sont pas ceux qui en subissent les dictats et refusent de se plier à une norme pour une société malade.
Les misérables, ce sont ceux qui ont trop de pouvoir entre les mains et décident du sort d'autrui, le jettent comme un malpropre.

À l'ère du sans contact, cette époque où chacun, dans son coin, cherche son plus beau reflet dans le mirage de nos écrans.

Alors ? Toi aussi, tu veux "personnaliser" ton fil de régie publicitaire sur le web ?
Moi non plus. Entre pauvres, on se comprend...

Texte écrit par Po3m, un être humain radié de ses droits.
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Une petite pièce ? Envoie-la moi en zéro et un, des fois que le courant passerait entre nous.

Re: Entre pauvres, on se comprend...

Publié : 19 sept. 2025 21:22
par Po3m
L'insécurité grandissante, y compris contre les forces de l'ordre.

Le hic, c’est que les conseils départementaux jouent leur rôle, mais l’insécurité augmente à cause de la misère sociale et des droits coupés aux plus démunis.

L’objectif d’économiser 2 milliards, qui justifie la réforme de Pôle Emploi, a pour conséquence une vague de personnes qui perdent leurs droits, se retrouvent au RSA, subissent menaces et sanctions, puis se font radier du RSA.

Je ne suis pas du côté de la délinquance, encoire moins la violence — rien ne peut la justifier — mais il faut regarder la situation sociale désastreuse dans tout un pays, et la façon dont les plus pauvres sont conspués et maltraités. Le dialogue entre les institutions et la population est rompu, surtout au sujet des plus fragiles.

La volonté de vouloir faire des économies n’est pas nouvelle. Rappelez-vous : Sarkozy, en 2007, a commencé par supprimer la Police de proximité. Puis on a supprimé les subventions des structures locales qui maintenaient du lien social et donnaient un sens aux jeunes. La politique de l’habitat a concentré la pauvreté et la précarité, ce qui a renforcé les problèmes de discrimination et de racisme.

Il faut étudier les choses en profondeur. Mais pour apporter des solutions, la société doit savoir se regarder en face, ce qu’elle est globalement incapable de faire : assumer sa part de responsabilité. Ces jeunes exploités par les trafiquants, qui les a abandonnés ? Cela n’excuse pas la violence, mais ce sentiment d’insécurité augmente car les moyens sociaux qui existaient autrefois ne sont plus déployés aujourd’hui. Pourquoi ? Parce que ça coûte trop cher. Parce qu’il faut « économiser ».

On parle de faire travailler plus longtemps les plus âgés. Ça veut dire quoi ? Que l’on ne compte plus sur la jeunesse. C’est un aveu d’échec. On ne mise plus sur les jeunes, qui se sentent encore davantage exclus. Le racisme aussi a gagné beaucoup de terrain. Quand je vois que Reims, et plus largement le Grand Est, bascule dans l’extrême droite, ça me révulse.

Pauvres de vous, et surtout pauvre France. Cette France qui a choisi de rouler pour un petit monde d’entre-soi alors que la situation est critique, et qui mène une politique répressive à l’encontre des plus modestes. Asservis corps et âmes pour un monde qui marche sur la tête, où l’on est censés s’aligner sur la productivité inhumaine des Chinois, payés à coups de trique. Le travail précaire est devenu la norme. La pénibilité, surtout celle des femmes, est non ou mal reconnue. Certains, dans leur mauvaise foi et leur privilège, annoncent même que la pénibilité n’existe plus depuis que nous avons fermé les mines !

On se maltraite et on se malmène les uns les autres. Nous ne sommes plus protégés par la société parce qu’elle est aux mains d’incompétents trop occupés à désigner le danger là où il n’existe pas, à psychiatriser la pauvreté, à sucrer les droits et donc les ressources. Résultat ? On fabrique des SDF. On en parle, des familles mises à la rue ? On en parle des organismes de logements sociaux qui pratique la discrimination et font la chasse aux pauvres ?

Vous connaissez Pavlov ? L’expérience de Milgram ? Des gens qui ne rencontrent plus le public, mais appuient sur des boutons « à distance », administrativement. Nous en sommes là. Nous avons atteint ce mur-là. Celui qui mène à désigner son prochain par des noms d’insectes — cafards, et j’en passe.

Tout cela nourrit ce que nous ne supportons plus au quotidien : la stigmatisation, la désignation de boucs émissaires. Certaines pratiques de nos institutions sont dégueulasses. Inhumaines. Le pire, c’est que les gens qui exécutent ces missions ont l’impression de faire du bien à la société.
Tu as l’impression que plus personne n’est responsable de rien, que chacun à son poste est en mode « rien à foutre » et fait juste l’autruche. Alors les plus privilégiés cherchent à sauver leurs meubles… mais jusqu’à quand ?

Re: Entre pauvres, on se comprend...

Publié : 07 nov. 2025 16:53
par Po3m
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Enfin ! Un magasin simple
qui propose des prix simples
pour des gens simples
aux moyens simples
car ils ont un travail simple au salaire simple,
et parfois même sont simplement au RSA,
quand ils ne sont pas sans le sou.

Le hic, c'est que si ça vire Extrême droite en 2027 si tentée que Reims (et plus globalement notre pays) se trouve déjà fortement teinté de bleu marine, il sera moins simple d'exploiter le chinois (provocation volontaire et non gratuite). Une mondialisation choisie pour laisser vos salaires à la baisse et vous permettre de consommer les produits importés à bas coût. Shein n'est pas la cause, mais le symptôme d'un choix de société, issu de choix politique que nous n'avons pas choisi. Le consommateur pauvre n'a pas à être éduqué, sinon tu fais "de son petit boulot précaire" un vrai travail avec un vrai salaire au lieu de le faire bosser pour de l'argent de poche et dans ce cas de Shein on n'en parlerait plus !

Re: Entre pauvres, on se comprend...

Publié : 08 nov. 2025 00:59
par Po3m
La charge mise sur les retraités.

L’abandon de la jeunesse et la stigmatisation des hommes seuls au RSA : voilà le vrai visage d’une politique qui radie, isole, ou pousse en psychiatrie ceux qu’elle ne veut plus voir.

Pendant ce temps, certains groupes - exclusivement féminins - bénéficient d’un accompagnement ciblé et suivi.
Que l'on soit clair : je n’ai rien contre le soutien des femmes, bien au contraire. Car l'un n'empêche pas l'autre.

Mais il faut aussi dire la vérité : une politique très répressive s’exerce contre les plus démunis, et tout particulièrement contre les hommes seuls et subissant la précarité.

Nous sommes conspués, écartés, désignés comme fautifs.
Les services sociaux ne font plus de quartiers.
Les conseils départementaux ferment les yeux sur une partie de la population poussée à la rue… ou au suicide.

L’urgence, la vraie.

Oui, il y a urgence — mais pas dans le sens qu’on veut nous faire croire.
La population précaire souffre, va mal.
Pas parce qu’elle « est à soigner », mais parce qu’on lui supprime ses droits.
Il y a péril en la demeure : les élus ne semblent pas s’en rendre compte,
mais ils participent à mettre la rue à feu et à sang.

France Travail applique ses consignes : « le reclassement ».

En réalité, c’est la mécanique du découragement :
on brise les projets de création d’activité, on étouffe les idées,
on pousse les gens vers des petits boulots précaires — faire le père Noël, la plonge, le jardinage, laver les vitres…
Des métiers dignes, certes, mais ici instrumentalisés pour se moquer du monde.
Voilà comment on précarise le travail, comment on frappe une population déjà fragilisée.

Et pendant ce temps, les jeunes sont abandonnés.
Toujours les mêmes problèmes : formations insuffisantes, manque d’orientation, absence d’expérience…
Rien ne change.

Au lieu de construire une politique qui donne une vraie chance à la jeunesse,
et qui accompagne les précaires sans les stigmatiser,
on préfère psychiatriser la pauvreté,
instrumentaliser la santé pour justifier la répression.
La société marche sur la tête.

Résultat :
on demande de travailler plus longtemps,
de prendre la retraite plus tard,
et encore des efforts aux retraités.

Mais les pauvres ne sont pas que des pauvres,
et les hommes pauvres ne sont pas des malades mentaux !

Dans cette population, il y a des idées, des talents, de la motivation,
des gens qui travaillent 12 à 15 heures par jour pour s’en sortir,
sans forcément gagner leur vie.

Aux agriculteurs qui bossent 20 heures par jour pour 600 €,
personne ne va dire :
« Arrête de faire ton métier passion, va te trouver un vrai travail ! »
Parce que ce « vrai travail », ce serait souvent un emploi encore plus précaire, encore plus mal payé.
Mais à toi, qui défends ton projet, ton activité,
à toi qui te sacrifies pour ce que tu fais,
on te malmène,
jusqu’à te radier de tes droits.

Honte à cette politique de la misère !

Tu n’es pas un dingue, tu n’es pas un délinquant.
Tu défends juste ce qui t’anime, tu transmets.
Pendant ce temps, des services te piétinent,
jusqu’à te forcer à te défendre au tribunal administratif,
simplement pour ne pas crever dehors.

Honte à ceux qui mènent cette politique de la misère !
Honte aux misérables !
Honte à ces techniciens qui, derrière leurs tableaux Excel, appuient sur des boutons à distance pour sanctionner, pour mener une politique de laissés pour compte, d'oubliés, sans jamais rencontrer ceux qu’ils condamnent.

Cette politique de la sanction :
un conditionnement pour s'aligner sur cette danse menée par la Chine qui impose le nouvel ordre mondial, En marche ou crève !

Et les conséquences ?
Des vies brisées.
Des familles expulsées.
Des dettes qui s’accumulent parce qu’on n’a pas pu payer une facture.

Honte à cette partie de la société, composée de celles et ceux qui devraient accompagner et qui, faute d’aider, via la politique répressive menée par nos élus, décide de tout brûler.

Re: Entre pauvres, on se comprend...

Publié : 08 nov. 2025 14:36
par Po3m
Tonton.jpg
Tonton.jpg (46.74 Kio) Consulté 2516 fois
L'espérance de vie pour un homme à la rue est de 49 ans.
Source : https://www.medecinsdumonde.org/actuali ... hatgpt.com

Expulser cet homme à cet âge, c'était le condamner à mort.
J'ai une idée de la violence subie, celle qui nous est administrée et que l'on se doit d'absorber sans que l'on ne soit censé ouvrir notre bouche, car nous sommes priés de bien vouloir nous taire. Mourir, oui, mais en silence, comme pour garder la dignité nécessaire, celle qui nous est demandée dans ce cas. Les uns diront que "c'est une histoire personnelle" comme pour en dédouaner ceux qui nous condamnent. Mais ces faits sociaux trouvent leur origine en des décisions dont les conséquences sont d'une violence inouïe. Car être radié de tout, c'est d'une violence extrême. Cette violence-là, elle nous est inculquée par décision institutionnelle. Forcément, lorsque le mal est semé, il faut s'attendre au retour de bâton. Ceux qui décident en mettant leur humanité de côté, ceux qui pressent sur le bouton comme des robots, n'appliquant là que de la "technique administrative" sans voir plus loin que le bout de leur nez, de leur place, de leur confort, ne réalisent même pas les véritables conséquences sur le plan humain. Même s'ils doivent bien avoir une idée, car ne se sentent-ils pas toujours en sécurité, l'esprit pas toujours tranquille, les lieux de travail aux portes épaisses et verrouillées, preuves me semble-t-il qu'ils savent bien ce qu'ils font : la conscience lourde.

Il n'y a pas d'étude - pas encore mais j'invite les docteurs en sciences sociales à sérieusement s'y pencher - de causes à effet à propos des suicides, directement suite à décision des conseils départementaux lorsqu'une personne qui n'est ni délinquante, pas escroc, ni irresponsable, se fait radier de ses droits, ou expulsée sans alternative. A ma connaissance, il n'existe pas d'étude sur le sujet car ce serait politiquement extrêmement dérangeant.

Nous sommes dans une société qui court après les plus beaux selfies. Nous ne cessons de nous liker les uns les autres.
Donc quand une personne vient et semble un peu perdue, un peu larguée, de facto, presque inconsciemment, on la dislike. Le ou la professionnelle le range dans une case qui ne prête pas vraiment à la progression, se dit probablement que "c'est sa vie, il y est habitué de toute façon", oh et puis tiens, rajoutons une couche, menaçons-le en prime, on va lui parler d'assistanat, on se dit qu'on essaie de le secouer un peu pour voir ce qu'il en reste, sans se douter ne serait ce qu'une fraction de lucidité, que cette personne que l'on a en face a déjà "tout entendu", et s'est probablement dit tout ce qu'il est humainement possible de réaliser. Donc, s'il vous plait, arrêtez avec les "Mais, vous vous rendez compte" ? Arrêtez avec ces questions qui n'ont d'autre but que de vous donner l'impression de vous sentir meilleur(e). Comme si vous, peut-être, vous rendiez réellement compte de ce que l'on ressent, de ce que l'on doit vivre en situation de survie, de ce que l'on se doit de traverser, si tenté que l'on soit encore doté de cette vitalité pour vouloir nous en sortir. Mais... sortir de quoi ? Quand le regard que l'on reçoit nous range dans la maladie mentale ou la mauvaise volonté.

Ma colère, c'est une colère saine. C'est là, ça tonne, je m'en fiche si tu n'y trouves aucun sens. C'est un journal que chacun est libre de ne pas lire.
Il n'y a pas d'assistanat, ça n'existe pas. Dans cette situation, être responsable c'est ne rien attendre des autres. C'est ce pourquoi - dans le principe républicain - et parce qu'il n'y a rien à attendre des individus, il ne devrait pas être possible de nous mettre en situation de danger. Un individu, même sous couvert de la décision institutionnelle, ne devrait pas avoir le pouvoir de nuire à autrui.

"Ne fais pas aux autres ce que tu ne voudrais pas que l'on te fasse".

Attaquez-vous aux délinquants, aux fraudeurs, mais ce que vous faites est de confondre la pauvreté et les personnes qui subissent la précarité.
Enrayer la pauvreté, faire des économies, ce n'est pas s'en prendre aux plus vulnérables, ce n'est pas exécuter des vies en fermant les yeux, en mettant ce qui dérange sous le tapis. France, pays d'hypocrites qui se comparent aux voisins pour justifier des actes institutionnels indignes et impropres à notre Histoire. Vous n'apprenez pas. La politique sociale actuelle est contre-productive au possible, coûtera bien plus cher à terme que les quelques économies immédiates de réalisées.

Donc, c'est ça, on doit juste prendre la violence qui nous est donnée, et la fermer. C'est bien ce qui nous est demandé.

Re: Entre pauvres, on se comprend...

Publié : 15 nov. 2025 16:04
par Po3m
Bonjour,

Je pose ici un article, fruit de travail personnel.
L'objectif n'est pas d'entretenir un Pathos, encore moins d'enfoncer les portes ouvertes (dire tout haut ce que tout le monde sait tout bas), mais d'offrir de l'information, dans le but toutefois de contribuer à éveiller les consciences, à alerter sur une situation urgente. L'urgence, comprenez, consiste à "la désobéissance passive" au sein de vos postes (j'y reviendrai plus tard), sans pour autant mettre en danger vos emplois.

Merci.

Quand la France mange ses morts

Mortalité à la rue, sanctions administratives et “reclassement” à marche forcée

Introduction — Ce que disent les morts

Chaque automne, on « redécouvre » les morts de la rue. En 2022, au minimum 710 décès de personnes sans chez-soi ont été recensés par le Collectif Les Morts de la Rue (CMDR) et Médecins du Monde ;
l’âge moyen au décès tourne autour de 49 ans (environ 30 ans de moins que la population générale) et près d’un décès sur cinq est violent.

Sources :

– Présentation du 11ᵉ rapport (2022) : https://www.medecinsdumonde.org/actuali ... nnee-2022/

– Rapport PDF : https://www.medecinsdumonde.org/app/upl ... R_2022.pdf

– Page CMDR : https://mortsdelarue.org/publication-du-rapport-2023/

1) Un phénomène massif… et massivement masculin
Les études publiques montrent une forte sur-représentation des hommes parmi les sans-domicile. Les ordres de grandeur restent stables depuis plus d’une décennie.

Repères :
– Insee/Ined (2012, méthode de référence) : https://www.insee.fr/fr/statistiques/1288519

– Lancement Insee d’une nouvelle enquête 2025 : https://www.insee.fr/fr/information/7634303

– Billet Insee (périmètre, méthode) : https://blog.insee.fr/enquete-sans-domicile-2025/

– Données Paris (saturation des dispositifs) : https://cdn.paris.fr/paris/2024/01/08/p ... f-Bk6j.pdf

À retenir : ce cadrage ne nie pas les violences subies par les femmes ; il dit simplement que la rue tue surtout des hommes, ce qui doit informer la prévention, l’accès aux droits et la santé mentale — sans opposer les publics.

2) Le tournant “activation” : droits conditionnels, sanctions rapides

Depuis la loi n° 2023-1196 pour le plein emploi et sa mise en œuvre en 2025, la protection sociale s’« active » :

[] Inscription automatique des allocataires du RSA à France Travail ;
[] Obligation d’“activités” ≈ 15 h/semaine ;
[] Contrat d’engagement unifié (ex-CER/PPAE/CEJ/PACEA) ;
[] Barème national de suspension du RSA : 30 % à 100 % pendant 1 à 4 mois, avec rétablissement rétroactif en cas de régularisation.

Textes et notices :

– Décret sanctions n° 2025-478 (30/05/2025) : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/ ... 0051672648

– Fiche Service-Public (pédagogique) : https://www.service-public.gouv.fr/part ... tes/A18302

Contrôle de la recherche d’emploi : 610 780 contrôles en 2024 (+16,7 % vs 2023) ; montée en puissance annoncée en 2025, cap ≈ 1,5 million/an d’ici 2027.

– France Travail (bilan 2024) : https://www.francetravail.org/accueil/c ... pe=article

– Statistiques & analyse FT : https://www.francetravail.org/statistiq ... pe=article

– Le Monde (objectif & critiques) : https://www.lemonde.fr/politique/articl ... 23448.html

– Le Monde (tendance 2024) : https://www.lemonde.fr/emploi/article/2 ... 98637.html

Avertissements officiels (CNLE) : instabilité de revenus, inégalités territoriales, effets contre-productifs (santé/logement).

– Avis 27/03/2024 (sanctions) : https://solidarites.gouv.fr/sites/solid ... 3-2024.pdf

– Avis 14/03/2025 (loi “plein emploi”) : https://solidarites.gouv.fr/sites/solid ... 3-2025.pdf

– Avis mai 2025 (projet de décret sanctions) : https://solidarites.gouv.fr/sites/solid ... i-2025.pdf

– Synthèse secteur public : https://www.banquedesterritoires.fr/le- ... ein-emploi

Santé mentale & RSA : 36 % des allocataires en détresse psychologique (vs 14 % population générale).

– DREES (pdf) : https://drees.solidarites-sante.gouv.fr ... 4/14-8.pdf

– DREES (fiche) : https://drees.solidarites-sante.gouv.fr ... s-du-rsa-0

3) France Travail : accompagner… ou contraindre ?

Du CER au contrat d’engagement (2025)

Le contrat d’engagement remplace les anciens dispositifs (dont le CER RSA). Il fixe des objectifs et des activités ; son non-respect déclenche des suspensions selon un barème national.

– Décret n° 2025-478 (30/05/2025) : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/ ... 0051672648

– Service-Public (rétroactivité possible) : https://www.service-public.gouv.fr/part ... tes/A18302

Pratiques controversées constatées

[] Sur-contrôle : montée des contrôles, « remobilisation » ; ≈ 17 % des contrôles aboutissent à sanction/radiation selon la presse, plus de la moitié confirment la recherche active.

— France Travail (bilan 2024) : https://www.francetravail.org/statistiq ... pe=article

— Le Monde (24/04/2025) : https://www.lemonde.fr/politique/articl ... 23448.html

[] Disparités territoriales : variations fortes d’un département à l’autre ; égalité de traitement questionnée.

— Banque des Territoires (CNLE & critiques) : https://www.banquedesterritoires.fr/le- ... ein-emploi

[] Industrialisation/algorithmes : “robotisation” du contrôle pointée par des collectifs et professionnels du social.

— Revue travail social : https://dubasque.org/revue-de-presse-rs ... connaitre/

[] Malaise des équipes : portefeuilles trop lourds, standardisation des entretiens, moins de temps d’accompagnement “qualitatif”.

— Le Monde (26/04/2024) : https://www.lemonde.fr/emploi/article/2 ... 98637.html

— Contexte (forte féminisation du social) : https://www.ash.tm.fr/metiers-formation ... 967284.php

“Reclassement” vs projets portés par les personnes

De nombreux retours de terrain décrivent une préférence pour les voies standardisées (rapides, “métiers en tension”) au détriment des projets atypiques (formation longue, création d’activité, reconversion hors pénurie). Résultat : découragement, injonctions contradictoires, parfois sanction après contestation. Angle mort : pas d’indicateur national du taux de refus de projets individuels.

– CNLE (sécurisation des droits) : https://solidarites.gouv.fr/avis-du-cnl ... res-du-rsa

– Le Monde (18/03/2025) : https://www.lemonde.fr/politique/articl ... 23448.html

4) Le prisme du genre : faits établis, signaux d’alerte, angles morts

Un secteur d’accompagnement massivement féminisé

Les métiers du social en France sont très majoritairement exercés par des femmes : la DREES publie en 2025 que ≈ 86 % des salariés du social sont des femmes.

Source : https://drees.solidarites-sante.gouv.fr ... tiques-des

Côté formations sociales, la féminisation est du même ordre (≈ 82,6 % d’étudiantes en 2024).

Source : https://www.federationsolidarite.org/ac ... il-social/

Un phénomène de rue massivement masculin

La population sans-domicile est largement masculine (autour de 4/5), repère constant depuis la dernière grande enquête Insee (2012) ; nouvelle enquête lancée en 2025.

– Note Insee 2025 : https://www.insee.fr/fr/information/7634303

– Billet Insee : https://blog.insee.fr/enquete-sans-domicile-2025/

Que peut impliquer cette asymétrie ?

La sociologie du guichet montre comment normes implicites et représentations peuvent orienter l’évaluation et l’accès aux droits.
Réf. de cadrage : Dubois, Politiques au guichet (Presses de Sciences Po) — discussion : https://drees.solidarites-sante.gouv.fr ... ociale.pdf

Des travaux invitent à poser la question du genre dans le travail social (écoute, “adhésion”, définition du “bon usager”).
Réf. : Intervention, « Poser la question du genre dans le travail social » : https://revueintervention.org/wp-conten ... estion.pdf

Ce que l’on peut dire prudemment
Fait A — accompagnement très féminisé (≈ 86 %).
Fait B — rue très masculine (≈ 80 %).
Hypothèse à vérifier — ces asymétries peuvent générer des angles morts dans l’évaluation de certaines situations masculines (expression de la détresse, “adhésion” au contrat, lecture de projets non standardisés). Il manque des données publiques fines (par sexe) : orientations, refus de projets, motifs/durées de sanctions, délais de rétablissement, orientations santé/psy.

Effets potentiels quand on superpose genre + contrôle

Les dispositifs 2025 (contrat d’engagement, 15 h, barème de suspensions) sont critiqués pour leurs effets contre-productifs sur les plus fragiles (instabilité de revenus, ruptures logement, santé mentale).

– CNLE 2024 : https://solidarites.gouv.fr/sites/solid ... 3-2024.pdf

– CNLE mai 2025 : https://solidarites.gouv.fr/sites/solid ... i-2025.pdf

Or, si 79–80 % des personnes à la rue sont des hommes, toute politique de sanction non compensée risque mathématiquement d’exposer davantage des hommes déjà sur-représentés — sans intention discriminatoire. D’où l’exigence de données genrées publiques et d’un suivi par sexe des décisions (accompagnement, sanctions, rétablissements, orientations).
Encadré méthodo — Parler de biais sans stigmatiser

Établi : féminisation très forte du secteur (≈ 86 %) ; sur-représentation masculine à la rue ; effets délétères possibles des suspensions.
Sources : DREES (profils) https://drees.solidarites-sante.gouv.fr ... tiques-des
; Insee (enquête 2025) https://www.insee.fr/fr/information/7634303
; CNLE (sanctions) https://solidarites.gouv.fr/sites/solid ... 3-2024.pdf

Manque : indicateurs ventilés par sexe (acceptation/refus de projets, motifs/durées de sanction, rétablissements, orientations psy).
À éviter : l’amalgame « secteur féminisé ⇒ maltraitance des hommes ». On parle d’effets de système à documenter, pas d’accuser des professionnelles déjà sous tension.
5) Chômage, fins de droits et “débordement” vers les minima

La réforme de l’assurance-chômage (calendrier 2024-2025) vise 2 à 2,5 Md€ d’économies/an, ≈ 4 Md€ à partir de 2030, via un durcissement des paramètres (durée d’indemnisation, affiliation).

– Le Monde (15/11/2025) : https://www.lemonde.fr/politique/articl ... 23448.html

– Rappel (12/06/2024) : https://www.lemonde.fr/politique/articl ... 23448.html

– Unédic (situation financière) : https://www.unedic.org/actualites/l-une ... ce-chomage

Mécanisme : plus de fins de droits → bascule vers minima sociaux → exposition au contrat d’engagement et au barème de suspensions. Pour une minorité vulnérable, enchaînement insécurité alimentaire → ruptures d’hébergement → évitement des institutions. C’est là que se joue la prévention des morts de la rue.



6) “La France mange ses morts” : une politique publique peut sauver (ou perdre) des vies
Les 710 décès de 2022 (âge moyen 49 ans) ne sont pas des “effets de bord”. Ils sont le produit de décisions : hébergement saturé, droits conditionnels, sanctions rapides, reclassement standardisé. L’enjeu n’est pas d’opposer “bons” et “mauvais” allocataires ; il est d’évaluer l’efficacité et l’humanité d’un modèle.

Ce qui fonctionne (consensus associatif & santé publique) :

[] Socle vital inconditionnel (nuit + jour) ;
[] Continuité du revenu pendant litiges/recours ;
[] Accompagnement intensif mais non punitif (portefeuilles réduits, pair-aidance, référents logement/santé) ;
[] Co-construction du projet (formation longue/entrepreneuriat possibles) ;
[*] Données publiques départementales sur sanctions/rétablissements/recours (transparence).

Encadrés chiffrés & pratiques

Encadré • Contrôles 2024 en 6 nombres

610 780 contrôles (+16,7 %) : https://www.francetravail.org/accueil/c ... pe=article

≈ 17 % aboutissent à radiation/sanction (lecture presse) : https://www.lemonde.fr/politique/articl ... 23448.html

• Cap 2027 : ≈ 1,5 M contrôles/an : https://www.lemonde.fr/emploi/article/2 ... 98637.html

60 % ciblent des métiers en tension et/ou retours de formation : https://www.francetravail.org/accueil/c ... pe=article

Inscription automatique des publics RSA (2025) : https://www.service-public.gouv.fr/part ... tes/A18302

Morts de la rue (2022) : 710 décès, 49 ans : https://www.medecinsdumonde.org/app/upl ... R_2022.pdf

Encadré • Sanctions : mode d’emploi (depuis juin 2025)
• Décret n° 2025-478 du 30/05/2025 (JO) : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/ ... 0051672648

Suspension 30–100 %, 1–4 mois, rétroactivité en cas de régularisation : https://www.service-public.gouv.fr/part ... tes/A18302

Alerte CNLE (instabilité de revenus, inégalités territoriales) :
https://solidarites.gouv.fr/sites/solid ... 3-2024.pdf

https://solidarites.gouv.fr/sites/solid ... 3-2025.pdf

https://solidarites.gouv.fr/sites/solid ... i-2025.pdf

Encadré • Création d’activité : check-list pour « tenir » face au reclassement
Modèle éco clair + jalons 3/6/12 mois + indicateurs (CA, MVP, clients/tests).
Preuves de traction : POC, pré-commandes, lettres d’intention, partenariats ; accompagnement (BGE, CMA/CCI, pépinière).
Contraintes prises en compte (santé, transport, garde) avec justificatifs.
Plan B court terme (heures/mission) sans enterrer le projet.
Traçabilité écrite : CR d’entretiens, mails, demandes d’adaptation du contrat (objectifs réalistes).
Recours : médiation, commissions départementales ; préserver la continuité du revenu pendant l’examen.

Contexte et justifications :

— CNLE (sécurisation des droits) : https://solidarites.gouv.fr/avis-du-cnl ... res-du-rsa

— Analyse presse : https://www.lemonde.fr/politique/articl ... 23448.html

Mini-chronologie (repères clés)

27/10/2023 — 11ᵉ rapport CMDR (2022) : 710 décès, 49 ans d’âge moyen, ≈ 20 % de morts violentes.
https://www.medecinsdumonde.org/actuali ... nnee-2022/

https://www.medecinsdumonde.org/app/upl ... R_2022.pdf

18–19/12/2023 — Loi n° 2023-1196 “plein emploi” (promulgation & JO).
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/ ... 0051672648

25/04/2025 — Bilan FT 2024 : 610 780 contrôles (+16,7 %).
https://www.francetravail.org/accueil/c ... pe=article

30/05/2025 — Décret sanctions n° 2025-478 : barème national (suspension 30–100 %, 1–4 mois).
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/ ... 0051672648

Mai–juin 2025 — Montée en charge, objectif ≈ 1,5 M contrôles/an.
https://www.lemonde.fr/politique/articl ... 23448.html

Recommandations opérationnelles

[] Publication trimestrielle par département d’indicateurs genrés : parts H/F des sanctions, motifs, durées, rétablissements, recours, refus de projets (formation/entrepreneuriat).
[] Référent “genre et précarités masculines” dans chaque équipe RSA/France Travail.
[] Clause de “non-rupture” : pas de suspension sèche en cas de vulnérabilité ; accompagnement renforcé préalable.
[] Moratoire évaluatif sur la suspension-remobilisation (publication mensuelle : sanctions, rétablissements, recours, délais).
[] Droit opposable au projet (formation longue/entrepreneuriat) + indicateur national du taux de refus.
[] Portefeuilles plafonnés, pair-aidance, référents santé/logement ; frein à l’industrialisation algorithmique.
[] Socle vital inconditionnel (hébergement + alimentation), y compris en cas de litige.
[] Passerelles chômage ↔ RSA sans rupture de droits (prévenir les fins de droits sèches).

Conclusion
La France ne “mange” pas ses morts par goût, mais au sein d'un système qui contient ses paradoxes. Quand l’accès aux droits devient conditionnel, que l’obéissance pèse plus que l’utilité, on fabrique des vies interchangeables — et, à la fin, des morts interchangeables. Nommer, mesurer, sécuriser, accompagner : c’est cela, la politique publique qui sauve des vies.

Bibliographie web (liens en clair)
Médecins du Monde / CMDR (mortalité 2022) :
https://www.medecinsdumonde.org/actuali ... nnee-2022/

https://www.medecinsdumonde.org/app/upl ... R_2022.pdf

https://mortsdelarue.org/publication-du-rapport-2023/

Insee / Ined (cadrage sans-domicile) :
https://www.insee.fr/fr/statistiques/1288519

https://www.insee.fr/fr/information/7634303

https://blog.insee.fr/enquete-sans-domicile-2025/

Paris / saturation dispositifs :
https://cdn.paris.fr/paris/2024/01/08/p ... f-Bk6j.pdf

France Travail / contrôles :
https://www.francetravail.org/accueil/c ... pe=article

https://www.francetravail.org/statistiq ... pe=article

CNLE (avis 2024–2025) :
https://solidarites.gouv.fr/sites/solid ... 3-2024.pdf

https://solidarites.gouv.fr/sites/solid ... 3-2025.pdf

https://solidarites.gouv.fr/sites/solid ... i-2025.pdf

https://www.banquedesterritoires.fr/le- ... ein-emploi

Légifrance / Service-Public (sanctions) :
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/ ... 0051672648

https://www.service-public.gouv.fr/part ... tes/A18302

Presse :
https://www.lemonde.fr/politique/articl ... 23448.html

https://www.lemonde.fr/emploi/article/2 ... 98637.html

https://www.lemonde.fr/politique/articl ... 23448.html

https://www.lemonde.fr/politique/articl ... 23448.html

DREES (santé mentale & RSA / profils du social) :
https://drees.solidarites-sante.gouv.fr ... 4/14-8.pdf

https://drees.solidarites-sante.gouv.fr ... tiques-des

Formation & féminisation du social :
https://www.federationsolidarite.org/ac ... il-social/

Références de cadrage (genre & guichet) :
https://drees.solidarites-sante.gouv.fr ... ociale.pdf

https://revueintervention.org/wp-conten ... estion.pdf

Unédic / chômage :
https://www.unedic.org/actualites/l-une ... ce-chomage

Revue de presse sociale / contrôle :
https://dubasque.org/revue-de-presse-rs ... connaitre/

Re: Entre pauvres, on se comprend...

Publié : 15 nov. 2025 17:58
par Po3m
Toujours dans l'optique d'accomplir un geste citoyen, à titre informatif, mais aussi de projection.

C'est la suite du billet précédent.
Notamment pour ce qui concerne : "La réforme de l’assurance-chômage (calendrier 2024-2025) vise 2 à 2,5 Md€ d’économies/an, ≈ 4 Md€ à partir de 2030, via un durcissement des paramètres (durée d’indemnisation, affiliation)."

Pour les deux ou trois personnes qui m'ont suivi, qui suis-je ?
Je me fiche bien d'être quelqu'un. Je ne suis qu'un grain de sable parmi tant d'autres.
Vivant le désastre de l'intérieur pour avoir à subir une situation que tant d'autres subissent, je ne fais manifestement que passer.
Ce geste, bien sûr, je me le donne en partie, mais après mûre réflexion, il n'est pas question d'entrer dans un discours pathologique, encore moins de convaincre qui que ce soit d'être et d'agir pour une meilleure humanité. Encore une fois, qui suis-je ? Je ne suis pas meilleur que vous autres. Je tâche simplement de ne pas commettre du mal pour autrui. Je m'efforce de ne pas juger ce que je méconnais, même si à moi aussi, cela me demande des efforts importants.

Dans les temps à venir, ça sera pour moi de plus en plus difficile. Sans m'étendre.
Aujourd'hui, je suis encore en capacité d'analyse et d'actions, mais d'ici ces prochaines semaines, ça ne sera plus le cas.
Je jette mes tout derniers efforts dans ces derniers écrits que je souhaite non gratuits. Je souhaite laisser autre chose que de simples critiques, juste une invitation à remettre en question profondément ce qui se joue, appuyé par de la réflexion et de l'information sourcée. Je ne suis pas aussi rigoureux que les personnes qui sortent d'un bac+5 et davantage, conscient que de poster sur la partie consacrée aux assistants sociaux, c'est forcément devoir - ne serait que par respect - se montrer à la hauteur ; donc j'espère toutefois que cela pourra à vos yeux représenter une valeur.

Je sais que vous ne faites pas dans la charité, je sais que vous êtes des professionnels (ou en devenir), je sais tout ça.
Mais je sais aussi et surtout que je ne sais pas, et je tiens à ce que ce soit clair. "La vérité est ailleurs" (X-Files), pardon, ça me fait rire.

Pour revenir sur l'objet de ce post.

"La réforme de l’assurance-chômage (calendrier 2024-2025) vise 2 à 2,5 Md€ d’économies/an, ≈ 4 Md€ à partir de 2030, via un durcissement des paramètres (durée d’indemnisation, affiliation)."

Nous allons tenter d'estimer les coûts du désastre annoncé, conséquences de cette réforme (ou batterie de réformes) qui visent à - il est dit - économiser.

1. Point de départ : l’“économie” annoncée

Le gouvernement vise 2 à 2,5Md€ = Milliards d'€ d’économies par an, puis autour de 4 Md€ à partir de 2030, via la réduction de la durée d’indemnisation, le durcissement des conditions d’affiliation, etc.
(Source : https://www.lemonde.fr/economie/article ... _3234.html
)

Comptablement, cela allège la dépense de l’assurance-chômage / Unédic.
Mais ce n’est pas une disparition du coût, c’est un déplacement :

– d’un budget (assurance-chômage) vers d’autres (Assurance maladie, hôpitaux, psychiatrie, hébergement d’urgence, justice, associations) ;
– et d’une forme de dépense (“revenu de remplacement”) vers une autre (“gestion de casse humaine”).

La question centrale devient alors :

combien coûtera cette politique de la casse ?

2. Ce que disent les études sur chômage, précarité et santé mentale

La littérature française est déjà abondante.

Une étude Insee (“Chômage et santé mentale en France”) montre que le chômage augmente significativement la probabilité de troubles dépressifs et anxieux, et que la durée du chômage aggrave la situation.
https://www.insee.fr/fr/statistiques/fi ... ES486B.pdf

Des travaux de la DREES sur “Santé mentale, expériences du travail, du chômage et de la précarité” confirment que la précarité et les ruptures de parcours (perte d’emploi, périodes sans droits, etc.) sont des déterminants forts de la souffrance psychique.
https://drees.solidarites-sante.gouv.fr ... 8/dd38.pdf

Le CESE rappelle qu’une hausse de 10 % du taux de chômage est associée à +1,5 % de suicides.
https://www.lecese.fr/sites/default/fil ... ourage.pdf

La DREES souligne que la perte d’estime de soi liée au chômage est un facteur important du suicide, qui se cumule avec d’autres déterminants sociaux.
https://drees.solidarites-sante.gouv.fr ... iers-2.pdf

Faire basculer des personnes de “chômeur indemnisé” à “sans revenu / radié / RSA sous pression”, c’est typiquement le type de choc qui :

– augmente la souffrance psychique ;
– augmente le recours aux soins ;
– augmente le risque de passage à l’acte (tentatives de suicide, suicides) ;
– augmente le risque de rupture (perte de logement, rue, désocialisation).

C’est à ce niveau que les chiffres deviennent lourds.

3. Les briques de coûts collectifs (ordres de grandeur)

Les éléments qui suivent ne sont pas des prophéties, mais des scénarios raisonnables fondés sur des ordres de grandeur publiés.

3.1. Poids global de la santé mentale

En France :

Les troubles psychiques représentent le premier poste de dépenses de l’Assurance maladie, avec plus de 23 Md€ par an (devant les cancers).
Le coût économique et social total (soins + pertes de productivité + coûts sociaux) des troubles psychiques est évalué entre 107 et 163 Md€ par an.
Environ 13 millions de personnes seraient concernées par des troubles psychiques.
(Source globale : https://www.senat.fr/questions/base/202 ... 1072S.html
)

Ordre de grandeur par personne (très grossier, mais utile pour un scénario) :
– 109 Md€ / 13 M ≈ 8 000 €/personne/an (coût éco & social moyen) ;
– 163 Md€ / 13 M ≈ 12 500 €/personne/an ;
– sur la seule Assurance maladie : 23 Md€ / 13 M ≈ 1 800 €/personne/an.

Dès qu’une politique pousse des dizaines ou centaines de milliers de personnes vers des troubles sévères ou chroniques, l’addition part très vite dans les centaines de millions voire les milliards d’euros.

3.2. Coût des suicides et tentatives

Une étude médico-économique récente indique que le coût économique annuel des suicides et tentatives de suicide en France est d’environ 24 Milliards d'€ (2019).
https://www.fondation-fondamental.org/a ... -s-eleve-a

Une instruction du Ministère de la Santé retient comme ordres de grandeur :
– ≈ 350 000 € pour un suicide (coût sociétal global) ;
5 000 à 15 000 € pour une tentative de suicide (coût sanitaire direct).
https://sante.gouv.fr/fichiers/bo/2019/ ... 0_0124.pdf

Sur cette base, même des variations modestes ont déjà un impact financier significatif :
+100 suicides/an → ≈ 35 M€ ;
+300 suicides/an → ≈ 105 M€ ;
+1 000 suicides/an → ≈ 350 M€.

Et cela ne tient même pas compte des tentatives, très nombreuses, ni de la souffrance des proches, impossible à monétiser mais bien réelle.

3.3. Précarité extrême, rue, hébergement d’urgence

Quelques repères :

La DREES estime que plus de 2,3 millions de personnes vivent en précarité extrême (≤ 660 €/mois).
https://www.drees.solidarites-sante.gou ... par-mois-0

Le nombre de personnes sans domicile a plus que doublé depuis 2012.
https://www.fondationpourlelogement.fr/ ... gement.pdf

Un rapport IGAS/IGF/IGA (2025) rappelle qu’un séjour hospitalier “social” d’une personne sans abri (séjour psy, maternité, etc. sans indication médicale, faute de solution autre) peut coûter environ 1 000 €/jour, soit 20 à 40 fois plus qu’un hébergement social.
https://igas.gouv.fr/sites/igas/files/2 ... 202025.pdf

Laisser des gens sans droits, sans revenu et parfois sans logement, ce n’est pas seulement une injustice sociale : c’est aussi un désastre budgétaire à moyen terme.

4. Un scénario chiffré pour contrer les “économies” affichées

Le scénario qui suit se veut volontairement prudent. Il ne cherche pas à maximiser les chiffres, mais à montrer que, même sans dramatiser, les “économies” annoncées sont en réalité absorbées par d’autres coûts.

Hypothèses de départ

Économie visée : 4 Md€/an à partir de 2030.
https://www.lemonde.fr/economie/article ... _3234.html

Populations directement touchées par le durcissement :
– chômeurs en fin de droits (durée réduite) ;
– personnes précaires radiées ou découragées (non-recours, sanctions, “parcours psy” imposés, etc.) ;
– une partie des allocataires RSA soumis à des contraintes renforcées (même si juridiquement ce n’est pas la même réforme, l’effet cumulé sur les mêmes personnes est réaliste).
https://fr.wikipedia.org/wiki/Revenu_de ... %A9_active

Hypothèse de population : entre 150 000 et 300 000 personnes basculent dans une situation durable de précarité extrême aggravée du fait de l’ensemble “radiations / fin de droits / durcissement” sur plusieurs années. Il s’agit d’une fraction des millions de chômeurs et d’allocataires, donc l’ordre de grandeur reste modéré.

4.1. Surcoût “santé mentale” (troubles anxio-dépressifs)

Hypothèse : coût annuel moyen supplémentaire par personne, lié à la dégradation de la santé mentale.

Hypothèse prudente : +5 000 €/an (soins, arrêts de travail, pertes de productivité, aides diverses), ce qui reste en-dessous de la fourchette 8 000–12 500 €/personne/an issue des estimations globales.
https://www.senat.fr/questions/base/202 ... 1072S.html

Calcul :
– pour 150 000 personnes : 150 000 × 5 000 € = 750 M€/an ;
– pour 300 000 personnes : 300 000 × 5 000 € = 1,5 Md€/an.

Une montée en gamme de la souffrance psychique chez “seulement” quelques centaines de milliers de personnes suffit donc à reconsommer entre 0,75 et 1,5 Md€ par an, en grande partie sur le budget de la Santé, déjà sous tension.

4.2. Suicides et tentatives liés à la précarité aggravée

L’objectif n’est pas de prétendre que “radiation = suicide”, mais de construire un scénario d’impact marginal.

Données de base :

– environ 8 900 décès par suicide par an en France (ordre de grandeur) ;
https://www.paca.ars.sante.fr/sante-men ... -et-enjeux

– coût sociétal d’un suicide : ≈ 350 000 € ;
– coût sanitaire d’une tentative : 5 000 à 15 000 €.
https://sante.gouv.fr/fichiers/bo/2019/ ... 0_0124.pdf

Hypothèse : l’ensemble des durcissements et radiations augmente de 1 à 5 % le nombre de suicides dans les populations très précaires (hommes seuls, chômeurs longue durée, personnes radiées, sans domicile, etc.).

– +1 % → ≈ 90 suicides supplémentaires/an → 90 × 350 000 € ≈ 31,5 M€/an ;
– +5 % → ≈ 450 suicides supplémentaires/an → 450 × 350 000 € ≈ 157,5 M€/an.

Les tentatives, beaucoup plus nombreuses, peuvent à elles seules ajouter plusieurs dizaines de millions d’euros supplémentaires chaque année. Même un effet marginal sur les suicides (quelques pourcents) représente donc des dizaines à plus de cent millions d’euros par an, sans parler du coût humain, qui restera de toute façon incommensurable.

4.3. Ruptures (logement, rue, hospitalisations sociales)

Supposons que, du fait des radiations et de la perte de droits, 10 000 personnes par an basculent dans une trajectoire de sans-domicile / hébergement d’urgence / hospitalisation sociale répétée (ordre de grandeur très modeste au regard des chiffres du mal-logement).
https://www.fondationpourlelogement.fr/ ... gement.pdf

Si seulement 1 000 d’entre elles passent 15 jours/an “à l’hôpital faute de solution sociale”, au coût ≈ 1 000 €/jour, cela représente :
1 000 personnes × 15 jours × 1 000 €/jour = 15 M€/an.

Et cela ne prend pas en compte :
– les nuits d’hôtel (un million d’euros/jour en Île-de-France pour les sans-abri, selon une estimation déjà ancienne) ;
https://www.lepoint.fr/societe/ile-de-f ... 876_23.php

– les centres d’hébergement d’urgence (CHU), les maraudes, les associations subventionnées, etc.

La mise à la rue ou le basculement en hébergement d’urgence, plutôt qu’un maintien minimal de droits, coûte ainsi au minimum plusieurs dizaines de millions d’euros par an pour un nombre relativement limité de personnes. À grande échelle, ce coût devient structurel.

5. Bilan macro : économies comptables, déficit social et sanitaire

En agrégeant les scénarios prudents ci-dessus, on obtient un ordre de grandeur global.

Économie affichée sur l’assurance-chômage : 4 Md€/an.
https://www.lemonde.fr/economie/article ... _3234.html

Surcoûts plausibles :
– santé mentale / troubles anxio-dépressifs aggravés : 0,75 à 1,5 Md€/an (chez 150 000–300 000 personnes basculant dans une précarité extrême) ;
– suicides et tentatives : environ 0,1 à 0,4 Md€/an (effet marginal de quelques %) ;
– hébergement d’urgence / hospitalisations sociales / rue : plusieurs dizaines de millions d’euros/an rien qu’avec quelques milliers de cas “lourds” ;
– pertes de productivité et de contribution fiscale, puisque les études montrent qu’une mauvaise santé mentale réduit la probabilité de rester en emploi ou de retrouver un emploi.
https://www.insee.fr/fr/statistiques/fi ... ES486C.pdf

Même dans un scénario très conservateur, les surcoûts approchent ainsi 1 à 2 Md€ par an.
Dans un scénario plus réaliste (plus de personnes touchées, effets plus marqués sur les suicides, aggravation du mal-logement), le coût social et sanitaire peut dépasser largement les économies comptables affichées.

Estimation claire du déplacement des coûts :
– économies brutes visées : 4 Md€ par an sur l’assurance-chômage ;
– surcoûts prudents estimés : 1 à 2 Md€ par an, dont une grande partie directement supportée par la Santé et l’urgence sociale.

Autrement dit, dans le scénario le plus modéré, entre un quart et la moitié des économies affichées sont potentiellement réabsorbés ailleurs, sous forme de dépenses de santé, d’hébergement d’urgence, de pertes de productivité et de désagrégation sociale. Dans un scénario de long terme plus réaliste, la somme des coûts sociaux et sanitaires peut non seulement annuler ces économies comptables, mais conduire à un surcoût net pour la collectivité.

6. Conclusion politique : de l’“économie” au tri social

À la lumière de ces ordres de grandeur, la réforme de l’assurance-chômage et le durcissement généralisé des droits sociaux ne relèvent pas d’une politique “efficace” sur le plan économique, mais d’un transfert de charge :

– des budgets sociaux nationaux (Unédic, assurance-chômage, RSA) vers les budgets de la Santé, des collectivités, des associations ;
– des lignes budgétaires abstraites vers les corps, les vies, les trajectoires humaines.

Il ne s’agit plus seulement de remplacer un dispositif par un autre.
Il s’agit de remplacer un droit (assurance chômage, RSA) par une politique de tri social qui fabrique du mal-être, des maladies et des morts évitables.

L’“économie” affichée n’est alors plus qu’un mirage comptable : ce qui est soustrait d’un côté revient de l’autre, plus cher et plus violent, en coûts de santé, en destructions de parcours de vie, et en atteintes à la cohésion sociale.

Conclusion : récapitulatif clair du déplacement des coûts (trois scénarios)

Les “4 Md€ d’économies” annoncées ne constituent pas un gain net. Elles correspondent à un déplacement massif des coûts vers la Santé, l’hébergement d’urgence, les associations, la justice, et la perte de productivité.
En réunissant les ordres de grandeur issus des études publiques, trois scénarios se dégagent.

1) Scénario modéré (le plus prudent possible)
Basé sur 150 000 personnes durablement fragilisées, un effet très limité sur les suicides (+1 %), et un impact modéré sur le mal-logement.
Surcoûts estimés :
– santé mentale : 0,75 Md€ ;
– suicides et tentatives : 0,03 à 0,1 Md€ ;
– hébergement d’urgence / ruptures de vie : ≈ 0,05 Md€.
Total : ≈ 1 Millards d€ à 2 Millards d€/an.
C’est la version “optimiste”, si l'on peut dire, des conséquences catastrophiques de cette politique de réduction des coûts (soi-disant).

2) Scénario réaliste (hypothèses cohérentes avec les tendances observées)
Basé sur 250 000 à 350 000 personnes touchées, aggravation documentée des troubles psychiques, augmentation de 3 à 5 % des suicides dans les publics à risque, et montée du mal-logement.
Surcoûts estimés :
– santé mentale : 1,2 à 2,0 Md€ ;
– suicides et tentatives : 0,15 à 0,35 Md€ ;
– ruptures de logement, hôpital social, dispositifs d’urgence : 0,1 à 0,3 Md€.
Total : ≈ 1,5 à 2,7 Millards d€/an.
Ce scénario absorbe déjà plus de la moitié des “économies”.

3) Scénario haut (pire scénario plausible à moyen terme)
Basé sur :
– un nombre plus important de personnes concernées (350 000 à 500 000) ;
– une intensification des troubles psychiques (effet cumulatif des sanctions, radiations, mise à nu des filets sociaux) ;
– une hausse plus forte des suicides dans les publics ciblés (+5 à +8 %, chiffres compatibles avec les corrélations internationales chômage/suicide) ;
– un système d’hébergement d’urgence saturé, renvoyant massivement vers des “séjours sociaux” à l’hôpital (1 000 €/jour).

Surcoûts estimés :
– santé mentale : 2,0 à 3,5 Md€ ;
– suicides et tentatives : 0,3 à 0,6 Md€ ;
– ruptures de logement / hospitalisations sociales / hôtels sociaux : 0,2 à 0,5 Md€ ;
– pertes de productivité et recettes fiscales évaporées : +0,5 à 1 Md€.

Total : ≈ 3 à 5,5 Millards d€/an.

Synthèse
– économies brutes visées : 4 Millards d€/an ;
– surcoûts modérés : 1 à 2 Millards d€/an ;
– surcoûts réalistes : 1,5 à 2,7 Millards d€/an ;
– surcoûts hauts : 3 à 5,5 Millard d€/an.

Conclusion générale
Même dans le scénario le plus prudent, la réforme “réabsorbe” entre un quart et la moitié de ses économies affichées.
Dans un scénario réaliste, elle en annule la majorité.
Et dans un scénario haut – plausible à moyen terme si la spirale précarité → santé mentale → rupture se poursuit – les surcoûts deviennent supérieurs aux économies elles-mêmes.

L’économie comptable de 4 Md€ se transforme alors en un déficit social et sanitaire de 3 à 5,5 Md€, accompagné d’un coût humain impossible à chiffrer.

Merci.

Re: Entre pauvres, on se comprend...

Publié : 15 nov. 2025 21:19
par Po3m
Ce que montre la recherche : Là où la politique de la sanction abîme, et où l’accompagnement vertueux sans condition fonctionne

Pour dépasser l’opposition caricaturale entre “il faut sanctionner les assistés” et “il faut soutenir les précaires”, il existe déjà une masse d’études en sciences sociales, en économie, en santé publique et en sociologie du travail. Toutes convergent autour de deux questions fondamentales :

Que produisent réellement les sanctions, radiations et retraits de droits ?

Que produisent les politiques fondées sur l’investissement social, le logement stable, la santé mentale et l’accompagnement digne ?

Les sanctions : un effet très limité sur l’emploi, des dégâts majeurs sur la santé et les parcours

Une large revue de littérature publiée en 2022 dans le Journal of Social Policy (“The Impacts of Benefit Sanctions: A Scoping Review of the Quantitative Research Evidence”, Serena Pattaro et al.) synthétise des dizaines d’études internationales.
https://doi.org/10.1017/S0047279421001069

Les conclusions sont constantes :

– certaines sanctions accélèrent artificiellement quelques “sorties du chômage”,
– mais beaucoup de sorties se font vers des “destinations inconnues”, c’est-à-dire hors des statistiques de l’emploi,
– les personnes sanctionnées retrouvent plus souvent des emplois précaires et moins bien rémunérés,
– les sanctions sont systématiquement associées à une dégradation du bien-être et de la santé mentale,
- Une partie des sorties vont vers le décrochage définitif :
la personne ne reviendra pas retrouver ses droits pour se faire à nouveau "fouetter".

Le “coup de pied au derrière” existe, mais il ne mène que très rarement à un emploi stable. Il produit davantage d’invisibilisation statistique, de précarité et de souffrance.

Un rapport du Department for Work and Pensions (Royaume-Uni), “The Impact of Benefit Sanctions on Employment Outcomes” (2023), est encore plus net :
https://www.gov.uk/government/publicati ... aft-report

Il montre que :

– une sanction retarde la reprise d’un emploi déclaré,
– et diminue les revenus futurs lorsque la personne finit par retrouver un emploi.

Même du point de vue strictement économique, les sanctions fragilisent le capital humain et affaiblissent les trajectoires professionnelles.

Une synthèse indépendante (Z. Jenkins-Hall, “Benefit Sanctions”, 2024) confirme :
https://secure.toolkitfiles.co.uk/clien ... -final.pdf

– revenus en baisse,
– endettement accru,
– aggravation de la précarité,
– effets nocifs sur la santé mentale,
– risques accrus de comportements de survie.

Les travaux autour du dispositif britannique “Universal Credit” (Gateshead Council) renforcent ce constat :
https://www.disabilityrightsuk.org/news ... w-research

– explosion des impayés de loyers,
– stress extrême,
– dépression sévère,
– idées suicidaires.

Au Royaume-Uni, plusieurs auditions devant des commissions parlementaires (notamment via Rethink Mental Illness) établissent un lien entre sanctions administratives et décompensations psychiatriques graves, voire certains décès.
https://committees.parliament.uk/writte ... 5567/html/

En France, les données confirment les mêmes mécanismes

La Dares (ministère du Travail) a publié en 2025 un Focus sur le devenir des personnes radiées des listes de France Travail.
https://dares.travail-emploi.gouv.fr/pu ... ce-travail

Les résultats sont très clairs :

– après une radiation, seulement 31 % sont en emploi salarié au bout d’un mois (contre 48 % pour les sortants “classiques”),
– lorsqu’ils retrouvent un emploi, il est plus souvent précaire : intérim, CDD, faible durée,
– le recours au RSA augmente à la suite d’une radiation,
– les hommes seuls, jeunes, peu diplômés, et habitants de quartiers populaires sont surreprésentés.

La radiation ne corrige donc rien : elle casse les trajectoires, déplace les gens vers d’autres dispositifs sociaux, dégrade les revenus et accroît la vulnérabilité.

Quand les politiques sont fondées sur la dignité : le retour sur investissement apparaît immédiatement

À l’inverse, les programmes fondés sur le logement, la santé et l’accompagnement montrent des résultats spectaculaires — humainement et économiquement.

Le cas le plus connu est le “Housing First / Un chez-soi d’abord”.
Synthèse officielle : “Un chez-soi d’abord – Retour sur 6 années d’expérimentation”, DIHAL / Ministère.
https://www.info.gouv.fr/upload/media/c ... 95070d.pdf

Résultats :

– maintien dans le logement très élevé,
– diminution des crises psychiatriques,
– diminution des hospitalisations,
– meilleure stabilité dans la durée.

Le cahier des charges national résume tout :
https://www.occitanie.ars.sante.fr/medi ... ad?inline=

Le coût du programme est entièrement compensé par les économies réalisées sur le système de soins et le secteur social.

Autrement dit :
Bien traiter les personnes vulnérables ne coûte pas plus cher : cela évite en réalité des dépenses autrement plus lourdes.

Les programmes d’accompagnement intensif vers l’emploi (comme Trajectoire Emploi, ou les évaluations de l’Unédic) vont dans le même sens.
“Une évaluation coût-bénéfice de l’externalisation des services de conseil vers l’emploi”, France Travail.
https://www.francetravail.org/files/liv ... p51138.pdf

Moins de radiation + plus d’accompagnement →
– retour à l’emploi plus efficace,
– meilleure stabilisation,
– moindres coûts sociaux annexes (santé, dettes, logement).

La stratégie d’investissement social : la dignité, meilleure pour l’humain et pour l’économie

De nombreuses institutions européennes défendent désormais la logique d’investissement social : la formation, le soutien, la prévention en santé mentale rapportent plus qu’ils ne coûtent.

Avis du CESE sur l’investissement social :
https://www.lecese.fr/travaux-publies/l ... ent-social

Et les rapports de la Commission européenne sur la santé mentale au travail montrent que :
https://ec.europa.eu/social/BlobServlet ... &langId=en

– réduire le stress,
– sécuriser les parcours,
– offrir un accompagnement personnalisé,

diminuent l’absentéisme, la rotation du personnel et les coûts de santé — pour un bénéfice net collectif.

Conclusion générale : la dignité coûte moins cher que l’humiliation

En rassemblant toutes ces recherches, un fil rouge très net apparaît :

– Les sanctions, radiations et retraits de droits provoquent des parcours plus chaotiques, une santé mentale dégradée, une précarité accrue, et des risques sociaux extrêmes (surendettement, ruptures, dépression, suicides).
– Les politiques d’investissement social (logement d’abord, accompagnement intensif, prévention santé, stabilité) améliorent réellement les parcours, augmentent la probabilité d’emploi stable, et coûtent moins cher à moyen terme.

Briser des gens n’a jamais constitué une politique efficiente. Soutenir les personnes vulnérables est non seulement humainement juste, mais économiquement rationnel.

Les réformes actuelles, qui prétendent économiser quelques milliards sur l’assurance-chômage ou sur le RSA, ignorent délibérément cette évidence : les coûts humains reviennent par la Santé, par les urgences sociales, par les drames évitables, et ils reviennent plus tard, plus forts et plus chers.

Merci.

Re: Entre pauvres, on se comprend...

Publié : 16 nov. 2025 16:54
par Po3m
Toujours dans l'optique de faire dans la pédagogie sociale.
Je m'adresse à tous, quelque soit votre bord politique. Le but est de transmettre de l'information que l'on ne peut pas discuter, de rester factuel.
C'est cet angle de communication que je choisis d'emprunter pour à terme avoir davantage d'impact, mais je ne veux pas être seul porteur de cette initiative et il n'y a pas d'objectif de récupération politique. Que chacun et chacune s'approprie ce contenu s'il s'avère être pertinent. Ce ne sont pas les élus qu'il faut convaincre, ce sont les gens qu'il faut instruire. Quand on est en situation de survie, il est naturel que l'on soit plus agressif. C'est naturel. Mais l'une des solutions, et j'y crois, et de transmettre de l'information utile. Les gens sont loin d'être cons et même si je ne dirai jamais pour qui voter : je souhaite redonner goût à tous ceux qui subissent la misère d'aller voter. Entre autres.

Je souhaite que les élus réalisent que les millions de gens qu'ils abandonnent pourraient redevenir une voix politique qui compte, et qui compte de façon bien plus juste que d'aller se disperser dans l'ignorance en cédant à la facilité d'aller chez les extrêmes.

Donc, je n'ai pas pour volonté de militer pour un parti. Je ne suis d'aucun parti.
Je suis simple citoyen et c'est juste comme simple citoyen que j'agis.
Ma cause, je le crois, est juste.

Pour en vernir à cette actualité, source :
https://www.cnews.fr/france/2025-11-16/ ... amilles-de

Sondage : 71% des Français souhaitent l’expulsion de toutes les familles de délinquants des logements sociaux

Image

Là encore, cette politique d'expulser les familles de jeunes délinquants serait - d'un point de vue budgétaire - la pire des solutions, et nous allons voir en quoi.

Expulsions “pour faire un exemple” :
la bombe à retardement d'une facture que l'on fera payer au contribuable


On veut expulser “les familles de délinquants” des HLM ?
Très bien.
Alors regardons ce que ça coûte, pour de vrai.

Ce qui est omis ou ignoré :

→ Les expulsés ne paient pas leur hôtel.
→ L’État paie.
→ Donc LES CONTRIBUABLES paient.


1. Une expulsion = un éclatement de coûts publics

Famille expulsée =
→ 115
→ hôtel social
→ structures mère-enfant
→ urgences
→ parfois ASE
→ accompagnement, police, justice

Nous ne sommes pas aux États-Unis :
les gens ne finissent pas “sous un pont” par magie.
Ils tombent dans des dispositifs… entièrement financés par l’État.

Et là, ça pique :

– Nuit d’hôtel : 70 à 150 €
– Structure mère-enfant : ~250 €/jour
– Hôpital faute de logement : 700 à 1 000 €/jour
– Loyer HLM : 300 à 450 €/mois

En France, “punir” coûte largement plus cher que “loger”.

2. Petit calcul : l’addition qui fait tousser

Si on prend juste 1 % de familles “à expulser” :
45 000 familles.

Et si seulement la moitié part à l’hôtel :
22 000 × 100 € × 30 jours =
66 millions €/mois
≈ 800 millions €/an

Et ce n’est que l’hôtel.

Ajoute :

M€= Millions d'€
– urgences : +100 à +300 M€
– structures spécialisées : +200 à +400 M€
– justice / police / récidive : +200 M€
– ASE, placements, suivi : +100 à +200 M€
– accompagnements sociaux : +200 M€

On atterrit tranquillement à +3 à +7 milliards d’euros par an.

Une politique qui coûte plus que le budget annuel d’un ministère…
le tout pour “faire un exemple”.

Le mal-logement coûte déjà autour de 30 milliards par an à la France (santé, éducation, justice, hébergement).
Ajouter des expulsions massives, c’est comme jeter un bidon d’essence sur une braise.

Les enfants expulsés, c’est :

– plus de décrochage
– plus de troubles psy
– plus d’hospitalisations
– moins de réussite scolaire
– donc plus de chômage futur
– donc plus d’aides sociales
– donc un coût massif et durable

C’est documenté. Ce n’est pas un avis.

3. Bonus : expulser fabrique plus de délinquance

C’est documenté depuis 20 ans :

Logement stable = baisse de la récidive
Instabilité forcée = explosion des passages à l’acte

Expulser des familles pauvres, c’est :

– casser leurs repères,
– multiplier le stress,
– briser les réseaux sociaux qui amortissent les crises,
– propulser les jeunes dans un chaos total,
- récupération facile pour les trafiquants.

Résultat ?

On fabrique exactement la délinquance qu’on prétend combattre.

Et on paie les dégâts.
Double peine pour le contribuable.

4. Conclusion : on jette de l’argent public dans un brasier

Expulser des familles pauvres, c’est :

– plus cher
– moins efficace
– plus de misère
– plus de récidive
– plus de dépenses publiques
– et un sentiment éphémère d’avoir été “ferme”.

En un mot :

Une politique émotionnelle, ruineuse, et totalement contre-productive.

Et pendant qu’on applaudit ces “solutions radicales” qui procurent un sentiment illusoire de satisfaction,
la facture arrive. Pendant que les familles expulsées subiront cette situation :

Les coûts exploseront tous les budgets,
La dette française s'alourdira,

Les contribuables paieront.

D'un point de vue structurel et macroéconomique, tout le monde en subira les conséquences.

Il serait moins coûteux de pratiquer une politique de logement décente et digne à l'adresse de tous.
Ce n'est pas en désignant et distinguant "les bonnes familles des mauvaises" que l'on réduira les coûts.

La politique de l'habitat est en grande partie responsable de l'installation des trafics.
Là où la société ne sait pas se regarder en face. Là où je pose les mots pour savoir nommer nos maux.

Re: Entre pauvres, on se comprend...

Publié : 27 nov. 2025 17:54
par Po3m
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Les uns diront toujours que "ce sont des cas particuliers", c'est ce que j'ai déjà entendu de (certains) professionels (de TRES mauvaise foi), "c'est un problème personnel, pas un problème de société". Mais c'est un fait de société. Cela en est le reflet.
Je ne voudrais pas que l'on dise que ça n'existe pas. Ces drames sont la réalité dans notre pays.