Dénoncer un collègue limite professionnellement à la direction

[Marie]

Bonsoir à tous,

J'espère trouver ici des réponse à un cas de conscience qui me pose question sur mon lieu de travail.

Je suis en poste en tant qu'éducatrice de rue en prévention spécialisée dans un quartier dit "difficile" d'Ile de France depuis un an et demi.

Depuis environ huit mois, un nouveau collègue nous a rejoint, et je fait face à de multiples problèmes avec lui, tant au niveau professionnel que relationnel.

Cette personne a commencé peu à peu à déraper sur certains de ses comportements.

Par exemple: il fait des blagues salaces devant les jeunes, il s'énerve parfois contre eux et "tourne en boucle", en colère, pendant 5,10 minutes.

Il m'a mit dans une position très difficile pendant un séjour en frappant une jeune avec une chaussure. Il n'a par la suite pas assumé son acte, ne s'excusant pas auprès des jeunes (que j'ai du recadrer sans qu'ils se sentent entendus par rapport à cette histoire), ni par rapport à mes autres collègues et chef de service (à qui il a raconté "qu'une chaussure à volé").

J'ai essayé, seule et avec mon autre collègue, de le recadrer, dans les 2 cas il a été d'une mauvaise foi totale, ne voulant rien assumer, et m'accusant de copiner avec les jeunes.

Dernièrement, il m'a franchement prise en grippe, et le simple fait de lui demander des informations (par exemple qu'elles démarches il a mis en place avec un de mes suivis et qui l'accompagne vers quoi), est vécu comme une attaque, avec des réactions agressive et discours accusateurs pendant de longues minutes.

Je commence à être franchement fatiguée de cette situation, et je n'arrive plus à travailler avec lui, c'est pourquoi j'ai décidé d'en réferer à ma chef de service.

Ma problématique est la suivante :

- Dois-je tout réveler sur son attitude limite? Je n'ai malheureusement pas eu la présence d'esprit de le faire au moment T, donc je l'ai "couvert" en quelque sorte.

- Dois je jouer sur nos problèmes relationnel (il est nettement moins agressif avec mon autre collègue), ou sur ses fautes professionnelles? Mon objectif étant de ne plus travailler avec lui, donc peut être de changer d'équipe, je pensais mettre plutôt l'accent sur une difficulté à se supporter mutuellement, ce qui est en partie vrai.

Merci d'avance pour vos réponses, et si je ne suis pas dans le bon topic, désolée, vous pouvez changer mon message de catégorie.

[Malika]

Bonjour,

Vous avez demandé un avis, je vous donne le mien.

-L'erreur souvent constatée et de vouloir protéger l'autre, qui est en réalité un non-sens. Surtout dans les cas que vous décrivez. Malheureusement c'est une pratique courante.

-Dans certaines situations, il faut des preuves probantes. Témoignage, preuve, pensez aux écrits...

-Avant de vouloir changer d'équipe, posez la question à votre "CSE" Chef de Service Éducatif si ce n'est votre collègue de changer de comportement et d'interroger sa pratique.

-C'est à votre CSE de se positionner, alimenter les informations qui peuvent l'aider, dans ce sens.

En tout cas bon courage.

[splendhora]

Bonjour,
pas évident comme situation. Avez vous dans votre institution des groupes d'analyse des pratiques ou groupes d'analyse institutionnelle?

Ce genre d'instance peut permettre de désamorcer un conflit d'équipe ainsi que de renouer un dialogue constructif au sein d'une équipe.

Dans un premier temps vous pouvez faire part de vos difficultés à votre CDS, mais si je peux me permettre faites attention à la façon de vous abordez le sujet, car malheureusement dans certaine situation il ne suffit pas " d'avoir raison" les choses sont parfois diffciles à faire bouger ... bon courage

[shariane]

Bonjour Marie,

Il y a deux lectures à faire de ton message :

- La première concerne tes observations sur le comportement de ton collègue avec les jeunes à savoir :
* comportement dérapant
* blagues salaces
* dérapage en frappant un jeune

(ces incidents auraient dû à mon avis faire l'objet d'écrits et de signalement auprès de ta chef de service).

- La deuxième lecture est en lien direct avec ses évènements qui ont fatalement des répercussions sur le travail d'équipe. Au-delà de l'aspect relationnel entre collègues, il s'agit plutôt d'une mise à mal du travail commun. Tu dis notamment qu'il vit "comme une attaque" les demandes concernant le suivi d'un jeune.

Je pense que le titre de ton message reflète ta difficulté à cerner le réel problème (dénoncer) qui n'est pas de dénoncer un collègue, mais plutôt d'évoquer de façon factuelle des faits qui se sont produits et qui selon moi ne sont pas professionnels à plusieurs égards.

Pour résumé, oui j'en parlerais avec la chef de service en expliquant précisément les faits, en mettant l'accent sur le fait que les agissements de ton collègue mette à mal le travail d'équipe et de ce fait ton travail.

Ensuite je rejoins Malika, charge à ta chef de service d'évaluer la situation et de trancher.

[Baleste..;]

Dans ce cas-là, il ne s'agit pas de "dénoncer" mais de "signaler" !!!!!

Le signalement est, dans certains cas, un devoir, une obligation. Donc pas de culpabilité.
Problème : certains cadres sont totalement incompétents et ne savent pas comment s'en sortir avec un signalement.

Un exemple ? Un cas de harcèlement GRAVE dans un HP. Le premier signalement au sous directeur a provoqué la panique de ce pauvre homme qui a carrément admit "faire l'autruche", c'est à dire ne pas vouloir voir la réalité et la situation alarmante du "harcelé". Il est resté à trembler dans son coin sans rien faire ni rien dire.
Nous avons continué avec un deuxième signalement, carrément au dirlo, qui a IMMÉDIATEMENT changé le pauvre garçon de service ! (où l a pu reprendre vie).

Donc, dans l'idéal :
- regarde à qui tu t'adresses pour signaler les faits. Évites les gens sans courage et sans qualité.
- Adresse ton signalement avec des FAITS PRÉCIS. Je veux dire : date, heures, propos, situation, témoins de la scène, réaction des jeunes etc....
- dans la mesure du possible (mais je rêve un peu) assures-toi de la confiance des témoins. Est-ce que -si ils sont sollicités- ils ne te contrediront pas ?
- Établis une corrélation avec la mise en danger des jeunes

J'ai eu à faire plusieurs signalements (soupçons d'inceste, présence d'une secte etc...) Un de ceux-ci concernait une secte qui avait envahi le milieu où je travaillais. J'ai mis UN AN pour constituer mon dossier, pour être sûr de ce que j'avançais, avec des preuves (diffusion de presse spéciale, coordination entre des gens de cette secte, etc...) Mais après ça a chauffé. Les RG de l'époque sont venus et le préfet a fait valser du monde. Et je n'ai jamais eu de reproches de l'entourage professionnel même si certains ont pensé que j'avais été un peu rude.

Bon courage et tiens nous au courant.

PS Il est probable que, si ce type a la psychologie et les attitudes que tu décris, il doit être ce qu'on appelle "une personnalité difficile à gérer" pour son chef de service. peut-être celui-ce sera très heureux d'être "aidé" et d'ajouter, à son propre dossier, les éléments que tu vas lui amener? Est-ce que tu comprends ce que je veux dire ? Tâtes un peu le terrain avant de te lancer.

[Marie]

Bonsoir à tous,

Tout d'abord merci pour vos messages, ça fait du bien de se savoir soutenue!

Pour répondre en bref:

- Oui, nous avons un groupe d'analyse des pratiques, où j'ai essayé à deux reprises, une foi seule avec le collègue en question et la psy, une foi à quatre avec mon autre collègue, de recadrer les choses. Réactions du collègue : mauvaise foi et agressivité. Par exemple, quand je lui ai reproché de n'être pas revenu avec les jeunes sur "l'affaire de la chaussure", il a dérivé en m'accusant en gros de copiner avec elles (c'était un groupe de filles), parce que je fume et elles aussi. L'histoire reflète bien son mode de fonctionnement : avant le séjour les jeunes lui avaient demandé de ne pas révéler aux parents qu'elles fumaient, ce qu'il a fait (nous rencontrons les parents avant chaque séjour). Après l'incident du séjour, je lui ai demandé d'appeler les parents pour s'expliquer sur son geste, ce qu'il a fait (les jeunes allaient de toute façon en parler..). Il a accepté de les appeler et d'expliquer l'incident, mais à rajouté juste après "mais je vais leur dire que leurs filles fument, il n'y a pas de raison!". Je m'y suis opposé, en avançant que cela ressemblait à une vengeance, ce qu'il a finit par accepter.
Bref, en analyse des pratiques, quand nous sommes revenues sur cet incident il a dévié sur le fait que nous n'avions pas les mêmes valeurs, car "je ne suis pas leur copain" et "il me semble que les parents devraient être au courant des pratiques des jeunes, notamment la cigarette, mais tu y étais opposée". Mauvaise foi totale!!!

Bref, l'analyse des pratiques, je m'y suis reprise à deux foi et je laisse tomber : je ne peux tout simplement pas discuter avec lui. c'est pourquoi j'en viens à solliciter la hiérarchie.

_ Pour ce qui est de "dénoncer", mes réticences viennent du fait qu'il se pourrait que cette personne soit licenciée, et je ne pense pas vouloir cela à ce stade. Je voudrais juste ne plus avoir à travailler avec lui.

Mon questionnement est donc d'arriver à doser mon argumentaire auprès de ma CS afin d'arriver à d'une, ne plus bosser avec lui, deux, de faire en sorte qu'il soit recadré par la hiérarchie afin qu'il ne recommence plus ses agissements.

J'ajoute que j'évolue dans un club de prév à forte tension entre direction et educateurs, ou les deux tiers du personnels ont démissionné il a moins d'un an. "Dénoncer" les agissements du dit collègue pourraient donc facilement me faire épingler comme la balance de l'association...

[Carole]

Bonjour Marie,

la situation n'est pas évidente. Tu dois essayer de définir quelles sont les priorités et en quel nom: Agir au mieux pour les jeunes?, être solidaire d'une équipe?, ne pas rechercher la protection d'une direction elle-même critiquable pour ne pas tomber dans l'autre clan/camps?, faire remonter des faits qui sont en réalité des fautes récurrentes?, ne plus avoir à faire à un collègue qui nous dérange?, ...

Il me semble que la ligne de conduite à adopter dans ce genre de situation est intérêt du public et protection de soi.
Malgré les réticences que je peux comprendre à parler de cette situation à ta direction, je pense que tu es arrivé à un stade où tu ne peux plus faire autrement, sous peine de couvrir d'autres faits anti-pédagogiques et qui peuvent s'avérer graves(chaussures, blagues salaces, ...)et lourds de conséquences...
Tu peux très bien parler à ta direction en exprimant tout d'abord ton malaise à parler ainsi de ton collègue et en expliquant que tu as essayé de discuter avec lui. Tu mets en avant que certaines de ses attitudes sont totalement inadéquates voir graves et que tu as l'impression d'être dans une impasse: Tu n'arrives plus à travailler correctement avec lui ni à échanger professionnellement. Tu expliques que tu souhaites faire remonter ces infos pour l'intérêt des jeunes, mais que cela te met dans une situation très délicate.

[chris41]

Bonsoir,

victime d'un "signalement" totalement faux et mensonger, je peux vous assurer que cela laisse des traces (dans le parcours professionnel mais aussi et surtout dans le parcours de vie et dans le côté psychologique.
Accusé à tort d'exhibition, ma hiérarchie à tout fait pour me faire perdre les pédales...je songeais à cette époque aux moyens de me suicider (sans laisser de côté ma famille, mais aussi en mettant en porte à faux mon employeur!!!).
Bilan : j'ai perdu mon travail et j'ai bien faillit y perdre la vie et/ou ma famille, parce qu'une cinglée (employée comme maitresse de maison) avait racontée une affabulation et que la direction avait trouvé là un bon moyen de me discrédité (nouvellement élu comme délégué du personnel, ce qui n'était pas vu d'un bon oeil par la direction.).

Bon courage à toi.

[Carole]

Bien entendu et comme il l'a déjà été dit, il faut s'appuyer de faits précis avant de signaler l'attitude problématique d'un collègue.

[Girard]

Pour réponde à votre question oui il faut dénoncer et ne pas avoir peur de ce mont. Je pense que nous sommes nombreux à supporter des attitudes similaires de collègues. Si vous partez le problème reste mais ne vous satisfera pas car cela touche le cœur de notre métier lié au relationnel avec les usagers. Si vous ne pouvez pas dénoncer alors proposez aux usagers de le faire eux même et pourquoi pas de porter plainte, contre la personne qui les maltraites et portez vous témoins. accompagnez les c'est tout à votre honneur et très professionnel. Vous verrez bien l'institution sera obliger de bouger. Ne pas déplacer ce mec mais le rayer de la liste de éducateurs y'en a marre de tout ces tarés dans le monde de l'éducation spécialisé et j'en connais aussi mais je balance non mais!
courage
Pascale