Pour demeurer en bonne santé, se sentir bien et avoir un corps qui fonctionne correctement, dormir suffisamment est important. Si cela se vérifie à tout âge, c’est particulièrement vrai pour les plus jeunes : un mauvais sommeil peut inhiber la croissance et le développement rapide qui caractérisent la petite enfance.
Il ne s’agit pas uniquement de la durée de sommeil : l’heure à laquelle on se couche joue également un rôle important dans le développement physique, émotionnel et cognitif des enfants.
Se coucher tôt, à une heure régulière est particulièrement important pour les plus jeunes à l’âge où ils passent d’un sommeil « biphasique » (autrement dit, à l’âge où ils font encore la sieste) à un sommeil monophasique (où ils ne dorment plus que la nuit).
Non seulement les couche-tard manquent-ils de sommeil, mais de plus divers travaux scientifiques suggèrent que se coucher à une heure avancée de la nuit est lié à des problèmes de qualité de sommeil ainsi qu’à des difficultés d’endormissement.
Chez les enfants, cette situation peut mener à des problèmes de concentration, de mémorisation et de comportement.
Se coucher tôt est bon pour l’organisme
Une étude menée auprès d’enfants d’âge préscolaire issu de familles à faibles revenus a révélé que le manque de sommeil est associé à un risque accru d’obésité. Une revue de littérature scientifique menée sur le même thème a quant à elle conclu que
« Le manque de sommeil est de plus en plus fréquent chez les enfants, et des liens entre une courte durée de sommeil dans la petite enfance et le développement de l’obésité sont de régulièrement mis en évidence. »
Il convient de souligner que la plupart des études sur cette question sont transversales, ce qui signifie qu’elles analysent des données provenant d’une population à un moment précis. Cette approche présente des limitations majeures qui font qu’il est difficile d’affirmer que les mauvaises habitudes de sommeil sont réellement la cause du risque d’obésité plus élevé.
Pour tirer ce point au clair, il faudra mener davantage d’études longitudinales, qui consistent à examiner les changements survenant au cours du temps.
Ceci étant dit, les preuves rassemblées par les études longitudinales existantes révèlent d’ores et déjà qu’il peut valoir la peine de se battre chaque soir avec ses enfants pour qu’ils se couchent de bonne heure. L’une d’entre elles, en particulier, a révélé que
« Les enfants en âge préscolaire qui se couchent tôt en semaine ont moitié moins de risque de devenir obèses à l’adolescence que les enfants qui se couchent à une heure tardive. L’heure de coucher est donc un levier qui peut être utilisé pour limiter l’incidence de l’obésité. »
Dans le cadre de nos propres travaux, publiés l’an dernier dans le journal Acta Paediatrica, mes collègues et moi-même avons analysé quatre années de données collectées auprès de 1 250 enfants aborigènes et indigènes du détroit de Torrès âgés de 5 à 8 ans.
Lors du suivi à trois ans, nos résultats ont révélé que le poids des enfants qui se couchaient régulièrement tard (après 21 h 30) était en moyenne supérieur de 1,5kg à 2,5 kg à celui des enfants qui se couchaient plus tôt (vers 19 h), et ce même après le redressement des données visant à tenir compte des facteurs sociodémographiques et des modes de vie.
Personne ne peut décrire avec certitude les causes de cette association entre heure de coucher et risque d’obésité. Les enfants qui veillent plus longtemps ont peut-être davantage d’opportunités de consommer de la malbouffe, ou de boire des boissons caféinées.
Il se pourrait aussi que des facteurs physiologiques plus complexes soient impliqués. En effet, l’horloge interne de l’organisme, qui régule le sommeil, joue aussi un rôle essentiel dans la sécrétion hormonale, le métabolisme du glucose et l’équilibre énergétique.
Que signifie « trop tard » ?
Les routines de sommeil sont façonnées par un large éventail de facteurs biologiques et socioculturels. Lorsque les parents décident de l’horaire de coucher de leurs enfants, ils le font sous l’influence de normes culturelles, de leur mode de vie, et de leurs connaissances sur l’importance du sommeil.
Il existe des recommandations concernant la durée de sommeil conseillée pour chaque classe d’âge, mais l’heure à laquelle un enfant devrait aller au lit n’est pas toujours très clairement définie. Pour s’assurer que les enfants en âge préscolaire disposent d’un sommeil adéquat, je recommanderais un horaire de coucher compris entre 19 h et 20 h. Tout en reconnaissant, bien entendu, que le fait de travailler ou de devoir assumer des responsabilités familiales peut sérieusement compliquer l’organisation de certains parents…
Il est également important de mettre en place une routine de « coucher tôt » avec vos enfants et d’essayer de s’y tenir même quand « il n’y a pas école demain ». Des horaires de couchers irréguliers perturbent les rythmes de l’organisme ce qui, comme l’ont expérimenté de nombreux parents, peut sérieusement compliquer le comportement des plus jeunes.
La petite enfance est une période critique, durant laquelle se construit le socle des habitudes de toute une vie. Mettre en place des routines de sommeil saines peut donner aux enfants les bases qui les aideront à adopter des comportements indispensables à leur santé et leur bien-être futurs.
Yaqoot Fatima, Senior Research Fellow, James Cook University
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.