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Les responsables du recrutement peuvent contribuer à attirer des candidats plus diversifiés

Dans un contexte de pénurie de talents et de complexité accrue du marché de l’emploi, accentué par le phénomène de « grande démission », les recruteurs peinent à attirer les profils dont les entreprises ont besoin pour se développer. C’est d’autant plus important que plusieurs études indiquent que sous certaines conditions près de la moitié des salariés interrogés en mai dernier envisageaient de quitter leur emploi d’ici à la fin de l’année.

Pour recruter et garantir l’égalité des chances, les entreprises doivent se démarquer et pouvoir toucher tous les candidats potentiels, quelle que soit leur origine. Or, bien que le rôle des recruteurs soit central dans la démarche d’inclusion et de diversité, les personnes en première ligne lors d’un recrutement ne sont pas toujours suffisamment formées pour relever ce défi, alors que leur contribution est tout aussi importante. Comment les aider à adopter la bonne posture lors d’un entretien ? Nous avons mené une recherche pour répondre à cette question.

La priorité des recruteurs

La question de la diversité devient une priorité croissante des recruteurs. Cette tendance s’explique non seulement par les avantages reconnus ou présumés en matière de performance et de créativité, mais également par la pression croissante pour une plus grande égalité raciale et de genre. Ainsi, 62 % des employés refuseraient une offre d’emploi d’une organisation dont la culture ne favorise pas la diversité. Cependant, bien qu’un quart des entreprises intègrent la diversité, l’équité et l’égalité dans leurs stratégies de recrutement, leurs initiatives s’avèrent souvent inefficaces.

Dans les faits, les candidats issus de groupes stéréotypés négativement (tels que les immigrants, les candidats plus âgés et les candidats noirs) ont moins de chances d’obtenir un entretien d’embauche. De plus, quand ils l’obtiennent, la façon dont l’entretien est conduit peut aussi représenter un obstacle majeur.

La menace du stéréotype

Plusieurs études montrent que les personnes aux prises avec des stéréotypes négatifs subissent un stress accru pendant le processus de recrutement, craignant de ne pas être évaluées de façon équitable. Ce phénomène, connu sous le nom de menace du stéréotype, est amplifié dès lors que les candidats issus de minorités interagissent avec des recruteurs blancs. Ce niveau supplémentaire d’anxiété entraîne souvent chez le candidat des performances médiocres lors des tests d’aptitudes ou un retrait complet du processus de recrutement.

Pendant des années, la stratégie dominante consistait à laisser les candidats issus de minorités gérer seuls la menace du stéréotype. Ces derniers, livrés à eux-mêmes, adoptaient des techniques telles que la pensée positive, des exercices de pleine conscience. Le résultat est que seulement 34 % de ces candidats ont estimé avoir été traités équitablement pendant le processus de recrutement et 62 % ont déclaré que leur origine ethnique limitait leurs perspectives de carrière.

Des solutions contre-productives

Les entreprises, quant à elles, peinent à trouver des solutions efficaces à ce problème. Certaines ont mis en place des politiques de discrimination positive, telles que des quotas mais ces mesures peuvent se révéler contre-productives car jugées comme allant à l’encontre des idéaux de la méritocratie. Dans d’autres cas, les entreprises tiennent parfois les communautés minoritaires directement responsables des difficultés de recrutement de talents diversifiés, comme, par exemple, l’indiquent les déclarations en 2019 du président de la banque Wells Fargo en déclarant publiquement qu’« il n’existe qu’un pool très limité de talents noirs à recruter ».

Quelle pourrait alors être la solution ? Selon Gallup, 41 % des managers de tous niveaux déclarent ne pas se sentir préparés à parler de questions telles que l’ethnicité sur le lieu de travail. Pourtant, ce sont eux qui peuvent jouer un rôle clé dans la conduite du changement. En effet, lors de l’entretien d’embauche, ils ont l’opportunité de partager les valeurs de l’entreprise, l’atmosphère de travail et la manière dont ils traitent leurs collaborateurs au quotidien, instaurant ainsi la confiance chez le candidat.

Le rôle stratégique du comportement du recruteur lors de l’entretien

Dans notre étude, publiée dans le Journal of Applied Psychology, nous nous sommes intéressés à ce que les responsables du recrutement devraient dire et faire lors d’un entretien d’embauche afin de réduire la menace du stéréotype chez un candidat et de l’encourager à postuler. Pour cela, nous avons mené quatre expériences auprès de résidents noirs de favelas brésiliennes (quartiers défavorisés), dont deux incluaient des processus de recrutement en situation réelle et des mesures physiologiques du stress (cortisol salivaire et pression sanguine).

France 24.

Nos résultats suggèrent que les responsables du recrutement doivent adapter leur comportement selon que le candidat appartient ou non à la même ethnicité que lui. Plus précisément, si tous deux sont noirs, le responsable du recrutement doit se montrer authentique. Un responsable authentique se fie à sa boussole interne et parle ouvertement de ses expériences, de ses valeurs et de ses convictions. Cela permet au candidat de se sentir connecté au responsable et de réduire son stress.

En revanche, lorsque le responsable du recrutement est blanc et que le candidat est noir, c’est un leadership éthique qui permet davantage de réduire la menace du stéréotype et de donner envie au candidat de travailler pour l’entreprise. Le recruteur adoptant un leadership éthique suit des normes morales établies et attend la même chose des autres. Une telle attitude garantit au candidat qu’en dépit des différences d’origine ethnique, son futur responsable le traitera équitablement, une fois embauché.

Flexibilité et contact humain dans le recrutement

Reconnaissant la valeur de la diversité, les recruteurs doivent convaincre les candidats issus de groupes traditionnellement stéréotypés qu’ils seront valorisés et respectés dans leur futur emploi. Notre étude montre que contrairement à l’idée reçue selon laquelle l’utilisation de l’intelligence artificielle conduit à une promesse d’égalité dans le processus de recrutement, les candidats issus de milieux sous-représentés sur le marché du travail apprécient de pouvoir interagir avec de vrais humains, à condition que ces interactions correspondent à leurs besoins. Les entreprises qui souhaitent attirer des talents plus diversifiés devraient alors former leurs responsables du recrutement à faire preuve de souplesse et à adapter leur comportement en fonction de leur ethnicité et de celle du candidat.

Urszula Lagowska, professeur de leadership et comportement organisationnel, Neoma Business School

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

The Conversation

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