La récente remise en cause de la protection constitutionnelle des droits des femmes d’interrompre leurs grossesses aux États-Unis dans l’arrêt Dobbs v. Jackson Women’s Health Organization (2022) confirme la fragilité de tout droit même dit fondamental.
Selon la majorité des juges conservateurs et pour la Cour ayant rendu cette décision, « l’avortement est une « profonde » question morale. La Constitution n’interdit pas à chaque État de réglementer ou d’interdire l’avortement aux citoyens (sic). La Cour Suprême dans ses arrêts « Roe vs Wade » (1973) et « Planned Parenthood contre Casey » (1992), s’est arrogée cette autorité. Elle annule ces décisions et rend ce pouvoir au peuple et à ses représentants élus ».
Or, l’interruption de grossesse, et non l’avortement, ne relève pas d’une question de morale théorique ou spéculative seule, elle rélève de questions éthiques et politiques concrètes concernant l’espace de liberté laissé au soin et aux droits des femmes comme l’a souligné Simone Veil.
La stratégie d’instrumentalisation du droit constitutionnel par les plus réactionnaires des juges conservateurs américains s’exprime aussi à l’échelon international dans la Déclaration de consensus sur la promotion de la santé de la femme et le renforcement de la famille. Ce texte de 2020 est issu d’une coalition de ministres, hautes représentantes et hauts représentants de gouvernements, d’États coauteurs, tels les États-Unis, l’Ouganda, l’Indonésie, l’Égypte, la Hongrie et le Brésil ; et, « d’États signataires », tels, notamment, le Bélarus, les Congo, Djibouti, l’Irak, le Koweït, la Libye, les Soudan, l’Arabie saoudite, la Pologne, les Émirats arabes unis. Elle fut écrite « en marge de l’Assemblée mondiale de la santé » alors même que l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) reconnait l’interruption de grossesse comme une prestation de santé essentielle.
Si cette déclaration est dénuée de toute valeur juridique, elle constitue un outil de propagande qu’il convient d’analyser à l’aune des instruments et instances des droits internationaux et régionaux des droits de l’Homme.