« Bon alors, on va faire un truc. Vous allez prendre les papiers avec tous (les) programmes (des candidats à l’élection présidentielle). Vous allez les lire et on va en parler, de ce que vous pensez positif et négatif dans chaque candidat. […] La prochaine fois, c’est vous qui votez. »
Voilà ce que proposent les parents de Chloé, jeune adolescente, à ses deux frères et à celle-ci à la fin d’un journal télévisé en 2017, lorsque les enfants commencent à les interroger sur les enjeux politiques de l’élection présidentielle en cours.
Cette question de l’initiation politique en famille se pose avec une acuité particulière dans le contexte de la dissolution de l’Assemblée nationale, de la montée des extrêmes et de la forte abstention aux élections.
Alors que les citoyens sont appelés aux urnes pour des élections législatives anticipées, nous nous proposons d’entrer dans le quotidien des familles pour comprendre les mécanismes de transmission civique qui s’y jouent, par le biais de ce qu’en rapporte une cinquantaine de jeunes rencontrés en entretien dans le cadre d’une enquête plus large menée sur l’éducation à la citoyenneté entre 2016 et 2021.
Pour étudier ces enjeux, le concept classique de « politisation familiale » ne nous semblait pas complètement adapté, puisqu’il appuie sur le rapport au politique de la famille plutôt que sur le processus de transmission politique dans la famille.
Nous lui avons préféré celui de « citoyennisation familiale », forgé en écho au concept de « citoyennisation » d’Albert Bastenier et Felice Dassetto, pour mettre en avant le processus de socialisation familiale par lequel un jeune est conduit à s’intéresser à la vie de la Cité.